1945. Le jour de la reddition du Japon, un saxophoniste aborde avec insistance une jeune chanteuse qui finit par céder partiellement à ses avances. C’est le début d’une histoire d’amour impossible, marquée par la carrière musicale de chacun des deux… Martin Scorsese renoue avec la grande tradition des comédies musicales des années quarante et cinquante. La reconstitution des clubs du début de l’ère du jazz bebop est assez splendide, tous sont assez différents. Scorsese rend hommage à Vincente Minnelli et fait marcher Liza Minnelli sur les traces de sa mère Judy Garland, tournant dans les mêmes studios, sur les mêmes scènes. Nul doute que cela devait être émouvant pour l’actrice. De son côté, De Niro va très loin pour donner vie à son personnage, l’acteur ayant même appris à jouer du saxophone pour le rôle. Les références sont nombreuses, des plus évidentes (le magnifique ballet final Happy Endings rappelle bien entendu celui de Band Wagon de Minnelli et le ballet lui-même est truffé de références) à celles qui le sont moins (comme cette chanson de Maurice Chevalier qui est une référence à une scène hilarante Monkey Business des Marx Brothers). L’histoire en elle-même n’est hélas pas très passionnante, le personnage joué par De Niro étant assez détestable, et de ce fait, le film paraît un peu long (2h30, mais il durait 4h30 dans le premier montage !) Les morceaux musicaux et les ballets sont heureusement là. La chanson-titre est devenue plus célèbre que le film lui-même.
Elle: –
Lui :
Acteurs: Liza Minnelli, Robert De Niro, Lionel Stander
Voir la fiche du film et la filmographie de Martin Scorsese sur le site IMDB.
Voir les autres films de Martin Scorsese chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Martin Scorsese…
Robert De Niro et Liza Minnelli dans New York, New York de Martin Scorsese
Remarque :
* Dans la très belle scène (sans musique) des danseurs anonymes du métro (vue de haut par De Niro), la danseuse est Liza Minnelli affublée d’une perruque (à noter que cette scène est certainement un hommage à On the Town de Stanley Donen).
SAX SONG IN THE CITY
La parution du commentaire de Lui tombe au milieu de l’actuelle rétrospective Scorsese de la cinémathèque où je viens juste de voir le film sur grand écran dans une copie de 2H55
Rien que le titre (film doublé d’une chanson) en dit long sur l’hommage rendu par le cinéaste à sa ville qu’il n’a de cesse de filmer, et pour la première fois ici en studio, ainsi qu’aux grandes productions flamboyantes passées des studios sur le déclin. C’est à la fois tout un monde et un temps recréés et une autre approche pour les aborder
Pour son sixième long métrage et suite au succès mondial de Taxi driver, Scorsese l’indépendant, l’auteur en marge, se laisse charmer par le chant des sirènes hollywoodiennes, qu’il a jusqu’ici ignoré et plutôt mis à mal, et qui lui font un pont d’or car cette nouvelle aventure ambitieuse et fastueuse va coûter cher à tout le monde, pour un four magistral autant public que critique à l’arrivée. Mais ça ne fait rien, malgré les apparences contre lui, malgré les coupes, le film regorge de qualités
Les trois heures d’horloge égrainent environ dix ans et cerne uniquement et avec beaucoup d’ellipses un couple de sa naissance (interminable scène de drague dans une foule phénoménale) à sa disparition (sans plus personne dans une rue déserte), et le couple chez Scorsese c’est un affrontement perpétuel, ça se rapproche de Scènes de la vie conjugale de Bergman passées parfois dans un shaker Woody Allen, autre New-yorkais, ce qui n’est tout de même pas rien
Tous les deux, Jimmy et Francine, sont dans la même partie, lui saxo ténor de jazz qui joue sa vie comme il improvise ses notes, elle chanteuse pourvue d’un bel organe au tempérament qui ne demande qu’à se développer. Oui mais lui est plutôt caractériel, imprévisible, menteur, violent, franchement asocial, égocentrique et maladroit (Bob de Niro est le seul acteur de talent que je connaisse ayant à son actif une telle liste de personnages antipathiques, dont il parvient à renvoyer une certaine fascination logée entre charme, maladresse, étonnement, humour qui l’ont rendu populaire). Elle (Liza, fille de qui vous savez) est la fille partie de rien qui arrivera tout en haut « parce qu’elle le vaut bien », ce que lui diront les autres
En fait le récit s’articule autour de chaque retrouvailles entre les deux personnages (comme dans le film de Bergman) dans des scènes de dialogues comme improvisées et étirées jusqu’à plus soif, ce qui fait que malgré la valeur des deux comédiens, malgré un mariage, un enfant et un divorce, on reste un peu à la peine (On se demande ce que pouvait représenter le premier montage de 4H30!)
Second sujet du film qui devient prépondérant au fil de la narration et du délitement du couple : l’art et l’artiste. Comment et jusqu’où un artiste, un vrai, indépendant, comme Scorsese surement à ce moment là, peut il vivre libre et sans compromission de et par son art. Donc l’Amour et l’Art
Car ils s’aiment, mais entre ces deux caractères, ça ne pourra jamais fonctionner. Il lui compose peu à peu une chanson dont elle va peu à peu à son tour écrire les paroles sur la musique, il y aura autant de compromis, d’arrangements et donc de larmes pour la chanson qu’il y en a dans leur vie commune. A la fin, lorsqu’elle devient célèbre en tournant dans un grand film hollywoodien qui la catapulte au sommet alors que lui reste fidèle à l’intégrité de sa petite boite de jazz (on pense à A star is born ou brillait Judy Garland alors que s’effaçait son mari James Mason), elle lui chantera « leur » chanson au milieu d’une foule mais rien que pour eux deux et cette métamorphose, point d’orgue, sera exceptionnelle
C’est parait-il pendant ce long tournage que Scorsese commença son voyage avec la coke qui allait le tenir plusieurs années, jusqu’à « Raging bull », sommet créatif du tandem Scorsese/De Niro à ce jour
Merci pour cet intéressant commentaire.