Saisons 1 (2021, 10 épisodes) & saison 2 (2023, 10 épisodes)
Dans un futur très lointain, l’Empire galactique englobe d’innombrables planètes dans toute la Voie lactée. Le mathématicien Hari Seldom a créé une nouvelle science statistique, la psychohistoire, qui lui permet de prédire la chute prochaine de l’Empire, suivie d’une longue période de chaos. Pour réduire cette période de barbarie à 1 000 ans, il suggère la création d’une fondation dont le rôle sera de rassembler le savoir de toute l’humanité dans une encyclopédie. Pour se débarrasser de lui, l’Empire l’autorise à la créer sur une petite planète, isolée aux confins de la galaxie…
Le cycle de Fondation est une œuvre de science-fiction écrite par Isaac Asimov. L’ensemble des trois premiers volumes, écrit dans les années 1940, fait partie des plus grands romans de science-fiction, certains (dont je fais partie) allant même jusqu’à dire *le* plus grand. Son ampleur, sa richesse, sa portée philosophique le rendent unique. Warner avait le projet en 2008 d’en faire un ou plusieurs longs métrages mais c’est finalement devenu une série produite par Apple en 2021.
Sans être parfaite, cette adaptation est plutôt réussie. Il me semble évident qu’il ne fallait pas s’attendre à une adaptation fidèle. La plupart des personnages principaux sont bel et bien là (même si plusieurs ont changé de sexe) et les créateurs de série ont bien su restituer l’ampleur du récit originel tout en s’en écartant. Les clones impériaux sont leur ajout le plus notable. Bien que cruel, le personnage de l’Empereur est devenu un personnage doté d’un charisme puissant, interprété avec panache par Lee Pace. Visuellement, les séquences créées par ordinateur sont très réussies, quelles soient spatiales ou en intérieur. En revanche, d’autres scènes paraissent très pauvres, c’est notamment le cas de toutes les séquences chez les « mentalistes » de la saison 2, ratées au point d’en être gênantes. Mais à mes yeux, les problèmes principaux sont l’étirement inutile de certaines scènes et le maniérisme de l’écriture, défauts inhérents au format de série (style auquel je suis plutôt réfractaire, je l’avoue). Malgré tout, nul doute que je regarderai la saison 3 quand elle sera disponible (les saisons 1 et 2 couvrent à peu près l’équivalent du premier livre du cycle).
Elle: –
Lui :
Acteurs: Jared Harris, Lou Llobell, Leah Harvey, Terrence Mann, Lee Pace, Laura Birn, Cassian Bilton
Voir la fiche de la série sur le site IMDB.
Le Cycle de Fondation par Isaac Asimov (7 volumes) :
Les nouvelles originelles paraissent entre 1942 et 1950 dans la revue Astounding Science Fiction. Au début des années cinquante, l’éditeur Gnome Press rassemble ces nouvelles et publie la trilogie fondamentale:
– Fondation (Foundation, 1951)
– Fondation et Empire (Foundation and Empire, 1952)
– Seconde Fondation (Second Foundation, 1953).
Après une trentaine d’années, plusieurs romans s’y ajoutent, étoffant le cycle d’origine avec une suite située 500 ans plus tard :
– Fondation foudroyée (Foundation’s Edge, 1982)
– Terre et Fondation (Foundation and Earth, 1986)
et un prélude :
– Prélude à Fondation (Prelude to Foundation, 1988)
– L’Aube de Fondation (Forward the Foundation, 1993).
Pour compléter la note explicative finale, notons que Prélude à Fondation (et Terre et Fondation qui boucle la boucle en achevant le cycle) relie ce cycle à l’autre grande œuvre d’Asimov : les innombrables récits de robots.
Plus exactement, Asimov avait écrit au milieu des années 1950 deux romans policiers qui permettaient une transition entre ses nouvelles robotiques et ses fresques de Space-Opera, mettant en scène un enquêteur terrien maladroit et insignifiant mais finalement brillant * et son associé robot issu des colonies extra-solaires. Il avait repris ce duo dans deux nouveaux romans écrits dans les années 1980, qui lui permettaient de réaliser une transition « historique » crédible entre l’univers de ses nouvelles de robots et celui de Fondation. Cela aurait pu suffire. Mais Asimov est allé plus loin avec Prélude à Fondation qui… qui… mais il ne faut pas que je spoile la révélation finale de ce très bon roman. **
* L’inspecteur Elijah Baley préfigure clairement Columbo. Son apparence insignifiante, ses « erreurs » fécondes qui font avancer l’enquête, le fait qu’il ne soit pas pris au sérieux par ses adversaires : tous ces traits de caractère ont ensuite été repris dans l’inspecteur Columbo. Je suis convaincu que les créateurs de la célèbre série policière télévisée avaient lu Les cavernes d’acier et The naked Sun (OK, j’aurais dû écrire le titre français « Face aux feux du soleil », mais le titre original, même s’il dit presque la même chose, ouvre tellement plus le champ des interprétations possibles, et avec tellement plus de poésie !). Si j’étais réalisateur de cinéma, je rêverais d’adapter The naked Sun.
** Puisque vous êtes fan de Fondation, vous avez dû noter qu’Asimov excellait dans la double révélation finale. Déjà, l’art de conclure une nouvelle ou un roman par une révélation (ou un coup de théâtre ***) qui nous laisse pantois est un art brillant. Mais en enchâsser deux est une prouesse stupéfiante.
Ainsi, à la fin de la nouvelle (ou court roman, constituant la quasi-totalité du deuxième tome) The Mule, nous apprenons que le Mulet est… Et hop, à peine reprenons-nous notre souffle de cette révélation incroyable, que nous apprenons pourquoi il s’est lui-même surnommé « le mulet »… et l’émotion s’ajoute au double coup de théâtre.
Ainsi, à la fin de la nouvelle (ou court roman, constituant la quasi-totalité du troisième tome) La quête de la Fondation (initialement titré … And now you don’t), nous apprenons où est réellement située la Seconde Fondation, ce qui a déjà de quoi estomaquer. Et hop, à peine reprenons-nous notre souffle de ce coup de théâtre, que nous apprenons « qui » est le Premier Orateur (et devons repenser toute la nouvelle a-posteriori pour comprendre à quoi il faisait référence lorsqu’il précisait « j’en ai pris soin », « j’y ai pourvu »).
Ainsi, à la fin du préquel Prélude à Fondation, nous découvrons comment Eto Demerzel a suivi et manipulé Hari Seldon (j’utilise cette formule floue pour ne pas trop spoiler d’éventuels lecteurs n’ayant pas encore eu la chance de lire cette œuvre). Et hop, à peine reprenons-nous notre souffle de ce coup de théâtre que nous apprenons que ce même Eto Demerzel n’est autre que… Outch. Ce frisson.
*** En lisant la biographie d’Asimov, j’ai découvert que deux de ses textes qui comptent parmi les quatre ou cinq que je préfère de lui… sont également deux de ses trois préférés.
Le premier n’appartient à aucun de ses grands cycles et se contente d’un « simple » coup de théâtre final (The uggly little boy). Comment ne pas avoir les larmes aux yeux en lisant les dernières lignes de cette nouvelle étonnante ?
Le deuxième n’est ni une nouvelle ni un roman, mais constitue une « partie d’un roman ». Mais une partie tellement autonome qu’elle pourrait être considérée comme une nouvelle à part entière (sauf qu’elle a encore plus de force dans le contexte du roman). Il s’agit de Les Dieux eux-mêmes, deuxième des trois parties du roman du même nom. Non seulement c’est la nouvelle de SF la plus inventive jamais écrite (bon, OK : la plus inventive que j’aie jamais lue) pour ce qui est d’imaginer une forme de vie extra-terrestre : pas simplement « non-organique », mais en plus « située dans un univers dont l’intensité relative des quatre forces de la physique est différente du nôtre » ! Non seulement il ajuste la narration à l’originalité de cette forme de vie intelligente basée sur une organisation ternaire (chapitres en trois partie à chaque fois), ce qui est donc une prouesse de forme. Mais en outre, le double coup de théâtre asimovien dans toute sa splendeur : le dernier chapitre nous apprend la relation incroyable qui relie les triades gazeuses aux « solides » ; et hop, à peine reprenons-nous notre souffle de ce coup de théâtre que nous aprenons en outre que la triade particulière que nous suivions n’est autre que…
Je ne connais aucun auteur capable d’enchâsser ainsi deux révélations (totalement cohérentes et vraiment essentielles pour interpréter le récit) et de créer un tel effet de sidération. Et son cycle de Fondation aligne un beau nombre de ces « doubles effets ».
Euh, non, je n’avais pas vraiment remarqué ces « doubles révélations finales » dans les romans d’Asimov. Ah, vous allez me faire relire mes Asimov (déjà que je venais de me mettre en tête de relire tout Fondation dans l’ordre chronologique… ). Bêtement, je n’ai aucun souvenir de Les Dieux eux-mêmes, quant à The Ugly Little Boy, je ne pense pas l’avoir lu (j’ai vu qu’il l’avait ré-écrit en roman avec Silverberg, mais je ne l’ai pas non plus).