Un accident sur une route de campagne. A son réveil, Julie apprend que son mari, célèbre compositeur, et sa petite fille sont morts dans l’accident. Elle se retrouve donc seule. Elle commence par vendre tous ses biens pour aller vivre une autre vie. Elle ne garde qu’un pendule décoratif composé de perles bleues… Trois couleurs: Bleu est le premier volet de la trilogie tricolore de Krzysztof Kieslowski qui tourne pour la première hors de son pays, la Pologne. Dans ce premier opus, il explore la notion de liberté et sa relation à la mémoire : peut-on effacer sa mémoire pour (re)trouver sa liberté ? C’est la quête que s’est donnée Julie, son personnage. Mais peut-on concevoir la liberté sans mémoire ? Non, semble nous dire Kieslowski appuyant son propos par l’image de la mère, atteinte de la maladie d’Alzheimer qui le rend comme prisonnière. Julie retrouvera un début d’équilibre en sachant intégrer ses souvenirs douloureux. La forme est assez brillante, Kieslowski réussissant une symbiose parfaite de tous les constituants du film. Il symbolise le deuil, et sa lancinante douleur, par de brusques (et spectaculaires) éclats musicaux. Omniprésent, le bleu est juste un parti-pris esthétique, il ne faut sans doute pas lui chercher une signification autre, la couleur bleue convenant bien au caractère froid et bien entendu à l’eau purificatrice de la piscine. L’interprétation de Juliette Binoche donne une grande intensité à son personnage.
Elle:
Lui :
Acteurs: Juliette Binoche, Benoît Régent, Emmanuelle Riva
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Remarque :
* Kieslowski laisse comme souvent un peu de place à un thème qui lui est cher, le hasard : un musicien de rue qui a trouvé le même thème que son mari, une rencontre fortuite avec les personnages du second volet, etc. Le thème du hasard peut paraître anodin mais c’est loin d’être le cas : l’acceptation (ou pas) de la notion-même a de fortes répercussions sur la construction de notre philosophie de vie (remarque très personnelle que vous n’êtes bien entendu pas obligé de partager…)
Juliette Binoche dans Trois couleurs: Bleu de Krzysztof Kieslowski.
Il me semble que le bleu a un autre rôle : celui de contrainte artistique.
Kieslowski adore les « règles créatrices », comme en témoigne son incroyable décalogue, qui précédait cette trilogie. Indéniablement, il s’est imposé une règle : un film à dominante bleu, un autre à dominante blanche, un autre à dominante rouge, comme hommage au pays qui l’accueillait (tiens, à l’époque la France était accueillante, c’est vrai). C’est également pour cela qu’existent des croisements entre les personnages des trois films, car il était important pour lui de marquer le fait qu’il s’agit d’une trilogie (même si chaque film existe avant tout de façon indépendante, et s’apprécie mieux — selon moi — en tant que pièce isolée).
Ensuite, bien sûr, une fois le choix intégré, il l’a transformé : c’est devenu l’expression d’une couleur émotionnelle, et comme les deux (couleur et émotion, bleu et désarroi) sont indissociables, cela n’est pas une contrainte artificielle, cela donne juste le « la ».
Quoi qu’il en soit, je me souviens que j’avais adoré ce film pour sa finesse émotionnelle et sa justesse. De très loin le plus réussi de la trilogie.
Oui, Kieslowski est venu tourner en France pour des raisons de financement : c’est Marin Karmitz qui lui offrait la possibilité de tourner et le choix du thème est effectivement très français…
Ceci dit, Kieslowski a bien entendu créé des variations très originales et inattendues de ces thèmes, symboles de la République française.