Elle :
Ce n’est pas le film de Truffaut que je préfère. A l’époque où il est sorti, au début des années 60, le scénario de ce couple à trois était particulièrement audacieux. Aujourd’hui, la trame semble avoir un peu vieilli. Je dois bien avouer que les multiples caprices amoureux de Jeanne Moreau m’ont un peu ennuyée, voire même irritée…
Note :
Lui :
Comme il l’a lui-même déclaré, François Truffaut cherchait à filmer dans Jules et Jim une histoire où le scabreux de la situation (un ménage à trois) n’entache en rien l’innocence des trois personnages, leur intégrité morale, leur tendresse et surtout leur pudeur. Il réussit là une belle histoire d’amour, impossible et tragique. Jeanne Moreau est rayonnante dans ce rôle de femme ensorceleuse, personnage central et pivot du trio. La mise en scène est fraîche et légère, le ton « narrateur » à la Truffaut est attachant. C’est un film que j’ai (nous avons) déjà vu plusieurs fois ; j’ai été un peu surpris de l’apprécier un peu moins cette fois-ci et même de lui trouver quelques longueurs. Il reste tout de même un film remarquable dans la filmographie de Truffaut, un film plein de vie et de fraîcheur.
Note :
Acteurs: Jeanne Moreau, Oskar Werner, Henri Serre
Voir la fiche du film et la filmographie de François Truffaut sur le site imdb.com.
Voir les autres films de François Truffaut chroniqués sur ce blog…
Vous avez vu et revu le film à plusieurs reprise dites-vous.
Sans doute que dans vos souvenir, certains événement se passaient plus rapidement qu’en réalité.
A sa sortie, en 62, une campagne de « biens pensants » a été menée en Belgique pour décrocher une interdiction aux moins de 18 ans.
J’ai gardé très nettement en mémoire le passage d’un pion dans ma classe de terminale lequel voulait remplir un questionnaire sur le nombre d’élèves ayant déjà vu ce Truffaut. Il s’agissait d’appuyer ladite campagne en relevant combien de jeunes avaient déjà été atteints par ces images « licencieuses et immorales ».
Le pion s’est fait virer poliment mais proprement.
Mais vous savez, même 20 ans après, « les 400 coups » étaient encore déclarés non adaptés aux moins de 16 ans par le Service cinéma de l’Education nationale belge !
Jules, Jim et les autres, mais surtout Catherine, car c’est à n’en pas douter pour Jeanne que François tourne son troisième film.C’est du reste la première fois qu’il place une femme, contrairement à ce que laisse penser le titre du film, en héroïne dans un de ses films.En France aussi le film est interdit aux mineurs à sa sortie en janvier 62. Un triolisme affiché sur l’écran – la femme, le mari, l’amant -n’est pas du goût de la morale. Donc, un trio, avant, pendant et après la guerre de 14. contrairement à toute attente, Jules est l’allemand que Catherine épouse et Jim est l’amant français, et puis voilà, c’est « le tourbillon de la vie », l’amour, la guerre.la roue qui tourne, etc. A trente ans il est encore difficile de déceler chez le cinéaste une voie affichée; « Les 400 coups » est axé sur l’enfance autobiographique, « Tirez sur le pianiste » tiré d’une série noire américaine est réinscrit dans le paysage français contemporain, « Jules et Jim » histoire d’amour à trois se présente comme un film « en costume d’époque », et le prochain « Farenheit 451″ sera de la science fiction en Grande Bretagne. Pourtant on peut distinguer des éléments de forme : jusqu’ici les films sont tournés en Scope noir et blanc, assez rare dans le cinéma d’alors, ils sont plutôt rapides composés de scènes courtes et alertes,contiennent une ou plusieurs chansons,sont issus souvent d’un matériau littéraire préexistant dont Truffaut garde la voix off en rappel. On apprendra bien plus tard à propos de Jules et Jim qui sont les personnes réelles ayant inspiré les trois personnages du roman d »Henri Pierre Roché. A revoir le film aujourd’hui dans le cadre de la rétrospective Truffaut, il a gardé beaucoup de sa fraicheur comme le souligne « Lui », des moments comme improvisés, heureux, même si sur le fond le film a perdu de l’intérêt qu’il a pu susciter à sa sortie. Le fait qu’il parle d’un temps encore plus éloigné n’arrange pas l’affaire, car les libres moeurs affichés par notre trio pour l’époque semblent dater d’une époque si lointaine qu’on oublierait presque qu’elle l’est vraiment. Truffaut, sous les apparences ultra modernes et non conformistes de la nouvelle vague était un grand mélancolique. Pendant ce temps là Godard a déjà tourné « Une femme est une femme », autre triolisme à Paris en 1960
Merci pour cette intéressante vision.
En écrivant les derniers mots à propos du film de Godard, j’ai oublié de préciser que dans une courte séquence d’Une femme est une femme, sorti six mois avant le film de Truffaut, Jeanne Moreau dans un bar ou entre Belmondo lui demande – « Ca va ? »; il répond : « Et vous, ça marche avec Jules et Jim ? « , ce à quoi elle lui répond : « Modérato ». Echange que seuls à l’époque les initiés pouvaient comprendre. Il était fréquent à l’époque que les films de la nouvelle vague, et principalement ceux de Godard et Truffaut, regorgent de ce genre de clins d’oeil