Elle :
Le film a fait scandale au tout début des années 60. La société française n’est encore pas prête à recevoir des images et des discours si débridés. Recherchant avant tout le plaisir et les aventures extra conjugales, un couple marié se confie tout et joue un petit jeu bien dangereux pour eux et pour leurs amis proches. Roger Vadim nous plonge au son du jazz dans la bonne société bourgeoise de Neuilly qui tente de s’encanailler et de s’adonner aux mœurs libertines. Les dialogues et les manigances sont pleins de perversité et de cruauté. Gérard Philipe et Jeanne Moreau en sont presque machiavéliques. Ce qui devait être un petit jeu d’amour sans conséquence devient une guerre froide et sans merci car l’amour avec un grand A s’est insinué dans leur relation. Les éclairages et la musique sont somptueux.
Note :
Lui :
Roger Vadim transposant le libertinage des Liaisons Dangereuses à notre époque, il y avait de quoi créer un scandale en 1960. Ce fut effectivement le cas avec interdictions de projection à la clef dans de nombreuses villes. Il est vilipendé encore aujourd’hui, les critiques acerbes se portant plus sur Roger Vadim lui-même que sur le film. Pourtant, Les Liaisons Dangereuses 1960 réussit parfaitement cette transposition de l’atmosphère feutrée du XVIIIe à la gent mondaine et superficielle du XXe. Faussement abrités derrière un détachement trop ostensible, ces personnages expriment encore plus fortement la cruauté de leurs sentiments que dans la version ultérieure de Stephen Frears. Le couple formé par Gérard Philipe et Jeanne Moreau provoque à la fois attirance et répulsion ; Roger Vadim sait parfaitement utiliser cet antagonisme pour former un cocktail explosif. La liberté des sentiments, il l’exprime aussi par une certaine liberté dans sa façon de filmer avec certains plans audacieux. L’image, d’un beau noir et blanc, et la musique très présente de Thelonious Monk et Art Blakey contribuent à faire des Liaisons Dangereuses 1960 le meilleur film (et de loin!) de Roger Vadim.
Note :
Acteurs: Jeanne Moreau, Gérard Philipe, Annette Vadim, Jeanne Valérie, Boris Vian
Voir la fiche du film et la filmographie de Roger Vadim sur le site imdb.com.
Jazz :
Thelonious Monk a enregistré la musique pour le film en juillet 1959. Ces morceaux ne sont jamais sortis en disque. En revanche, les morceaux enregistrés par Art Blakey et ses Jazz Messengers sont sortis en CD. Dans la scène finale de la surprise-partie, c’est Art Blakey que l’on entend mais c’est une autre formation que l’on voit jouer à l’écran avec Kenny Dorham, Barney Wilen et Kenny Clarke.
Autres adaptations du roman de Choderlos de Laclos :
Les Liaisons Dangereuses de Stephen Frears (1988), avec Glenn Close, Michelle Pfeiffer et John Malkovitch
Valmont de Milos Forman (1989), avec Colin Firth et Annette Bening
Cruel Intentions de Roger Kumble (1999), avec Sarah Michelle Gellar.
Les Liaisons Dangereuses de Josée Dayan (2003), film TV franco-canadien avec Catherine Deneuve et Rupert Everett.
« le meilleur film de R. V. »… ce n’est de toute façon pas grand’chose. Je vous trouve bien indulgents pour une chose qui, même à l’époque, eut surtout un succès de scandale.
(NB : la « gent », sans « e » SVP – bien que ce soit un mot indubitablement féminin ; du latin « gens », fém. aussi, quoique sans « a »).
Oui, les films de Vadim ne sont pas tous mémorables, loin de là… Mais que celui-ci ait eu un succès de scandale à l’époque ne doit pas nous empêcher d’essayer de le voir d’un oeil différent aujourd’hui. J’étais moi-même convaincu que Les Liaisons Dangereuses de Vadim n’avait que peu d’intérêt… je pense l’avoir déjà vu précédemment mais n’en suis même pas certain!
Merci pour la faute d’orthographe. C’est corrigé…
Je suis étonné de lire cette critique.
Je m’attendais qu’elle soit assassine. Les préjugés ont la vie dure.
Roger Vadim aux yeux des critiques souffre d’une réputation sous estimée de son oeuvre. Les mots qui reviennent au sujet de la plupart de ses films sont : paresseux, inconsistants, démodés…
Bref à l’exception peut-être de « Dieu créa la femme » (en raison du mythe Bardot et Saint Tropez), on a l’impression qu’il n’ a fait que des navets.
Je suis content que vous participiez à cette réhabiliation de ce » mal- aimé » de la Nouvelle Vague. Peut-on lui reprocher d’avoir mis plus de talent dans sa vie personnelle que dans ses films? En tout cas il a restitué ce goût du bonheur et des femmes ( avoir eu entre ses bras Bardot Deneuve et Fonda, beau palmarès) dans ses films. Il a accompagné toute ce mouvement de la libération sexuelle et en particulier de la femme sans jamais tomber dans l’écueil du morbide. Le sexe était un raffinement et le plaisir une élégance, un savoir vivre. Par ailleurs, derrière la légèreté apparente, il y avait toujours une mélancolie lancinante, provenant sans doute de ses origines russes. Il appartenait à une génération entre plaisir et désenchantement, préférant les douces récréations aux imposantes Créations. Dans cet entourage, je pense notamment à ce comédien trop tôt disparu, une sorte d’alter ego, aussi méconnu, qu’était Maurice Ronet.
Les critiques de chacun m’ont donné le sourire et envie de revoir ce film.
Merci.
J.
Hé bien mais ce n’est pas mal du tout ! et meme très bon ! Une somptueuse adaptation de Roger Vailland (grand séducteur lui-même), un exemple: Gercourt devient un américain au nom de Jerry Court: bravo ! et il y a Boris Vian, ouis BORIS !!! un peu gauche dans son rôle de séducteur mal fichu et éconduit mais quel bonheur de le voir à l’écran. Oui, un film fortement décrié à sa sortie et encore maintenant, mais que l’on comprend mieux en le voyant avec nos yeux d’aujourd’hui car portant aussi un regard formidable sur les années 60, autres ‘années fric’ + la beauté et l’oisiveté + Deauville, Mégève, N.Y, le scotch les cigarettes, les belles filles, on ne s’en lasse pas. A vrai dire, je ne m’attendais pas à une telle qualité de cinéma… littéraire, merci Vailland, = dialogues à couper au couteau. Pauvre Vadim cependant, un type pourtant attachant, la postérité ne retiendra pas grand chose de lui, sauf que Et Dieu créa… et les liaisons D sont des films qui disent plus qu’ils ne montrent. Un mot me revient pour caractériser ce film: savoureux !!!
Pardonnez-moi que j’ecris en anglais mais je suis américaine et je vive dans la République de la Colombie. I saw Les Liaisons Dangereuses 1960 in 1961 in Michigan and I have never forgotten it, especially the last scene. A beautiful and fascinating film! It made me read the book!
Merci pour cette chance ecriver!
C’est probablement le climat musical du film qui fait son principal intérêt, comme vous l’indiquez . A ce propos il semble qu’il y ait eu un conflit au sujet de la musique jouée par les Jazz Messengers qu’on entend dans le film, notamment le fameux thème « NO PROBLEM », il me semble que cette musique fut composée par le pianiste Duke Jordan qui l’enregistra avec un quintette lui-même étant au piano et Charlie Rouse au sax ténor (33t 30cm AJ 406), Vadim ne retint pas ces versions pour le film et préféra faire rejouer les thèmes par les Jazz Messengers. En consolation, D.Jordan interprète en quartet avec Barney Wilen un morceau (Prelude in Blue, à « l’Esquinade)dans le Film,et fut plus ou moins depossédé de sa paternité des thèmes composés. Je n’ai d’ailleurs pas trouvé d’édition de la partition du thème No Problem.