Elle :
Alain Resnais signe un film très particulier et peu facile d’accès durant lequel on peut éprouver un certain ennui. A mi-chemin entre imaginaire et réalité, il nous fait pénétrer dans un univers baroque d’une très grande beauté visuelle et baignant dans une musique envoûtante. Cette histoire d’amour fou avec cette belle femme interprétée par Delphine Seyrig passe en second plan. Le film s’attache davantage à la forme pour créer une atmosphère fascinante où l’on sent la patte d’Alain Robbe-Grillet. La mise en scène est somptueuse et très élaborée. Un grand travail sur les longs travellings, les éclairages et la composition des cadrages a été accompli. Les personnages en plan arrêté dans les décors de cet austère château de Marienbad font penser à des tableaux en clair obscur. Il faut se laisser gagner par la beauté sans chercher à décrypter le sens profond de ce film.
Note :
Lui :
Plus que tous les autres films d’Alain Resnais, L’année dernière à Marienbad est un film à nul autre pareil. La trame narrative s’efface, déstructurée et atemporelle, pour faire place à un travail esthétique sur les plans qui n’a que rarement été poussé aussi loin. Le film est le fruit d’une collaboration entre Alain Resnais et Alain Robbe-Grillet. Le lieu, un vaste château en Bohême, offre ses lignes géométriques pour constituer un environnement austère où évolue ce petit groupe de personnes empreintes de préciosité. Cette rigidité des lieux et des personnages vient en opposition totale avec l’amour fou entre les deux personnages principaux, un amour qui a du attendre une année pour pouvoir se déclarer et se concrétiser. Chaque plan semble travaillé à l’extrême, à commencer par les lumières qui façonnent des images d’une beauté à couper le souffle ; il y a aussi ces travellings, lents et doux, qui semblent caresser les êtres et les choses, déplacements aériens autour de scènes où le temps s’est figé ; enfin, Alain Resnais joue avec les décors extérieurs et intérieurs, vastes aires de marbre et de miroirs, et avec Delphine Seyrig dont chacune des postures semble avoir été pensée pour créer de nouvelles lignes gracieuses. Le spectateur que nous sommes acquiert dès lors l’impression de pénétrer un tableau vivant, hors du temps et des espaces. A mes yeux, L’année dernière à Marienbad n’est pas si difficile d’accès car il suffit de se laisser submerger par la beauté pour pénétrer ce dédale d’images et de sentiments. Le film devient alors terriblement envoûtant.
Note :
Acteurs: Delphine Seyrig, Giorgio Albertazzi, Sacha Pitoëff
Voir la fiche du film et la filmographie de Alain Resnais sur le site imdb.com.
Lire une analyse plus approfondie du film sur le site du Ciné Club de Caen…
Voir les autres films de Alain Resnais chroniqués sur ce blog…
Note : Le film a donné son nom au jeu avec des allumettes qui y tient une place si symbolique : on l’appelle maintenant le jeu de Marienbad. Le mari de Delphine Seyrig dit « je puis perdre, mais je gagne toujours » car en effet il est impossible au joueur qui joue en premier de gagner face à une personne expérimentée. Ce jeu a acquis une certaine popularité parmi les informaticiens car la méthode pour gagner repose sur l’utilisatisation des nombres binaires. Pour vous entraîner…
@Lui
« …durant lequel on peut éprouver un certain ennui… ». Cette nuit (29/01/2012), France Culture (vers 3 heures du matin) a rediffusé 2 emissions :
1) Interview-conférence de « Alain Robbe-Grillet » datant de 1961 et qui tente d’expliquer ce mélange ennui-fascination de beaucoup de spectateurs, et autres au sujet du film.
2) La première interview de « Delphine Seyrig » à la RADIO (1956) avec 2 interprétations au théâtre (Amour de papier et Roméo & Juliette)
Hélas, hélas… je n’ai pas eu la présence d’esprit d’enregistrer vu l’heure !!!
Pour ce qui est du film, j’ai été complètement « fasciné lors de sa diffusion sur ARTE mercredi, 10 août 2011 à 14:45 + « Annee Derniere a Marienbad – Tournage – Souvenirs De Une Annee A Marienbad ».
(Depuis lors on a eu aussi droit à « Baisers Volés » & « Muriel Ou Le Temps De Un Retour » sur TV5-FBS si je me souviens bien)
Au revoir.
Le seul film sur la vie après la mort. Désespérantes et s’effaçant lentement des bribes de la vie passée reviennent mécaniquement. Une âme est en jeu restera-t-elle là encore à répéter le jeu de plus en plus usé des anciens jours ou partira-t-elle pour… une autre vie,ailleurs? Les âmes sont comme les ruches: quand tout le miel d’hiver est mangé il faut bien repartir vers de nouvelles prairies… Evidemment on préfère voir dans ce film une histoire d’amour….mais quand on sait…. on frissonne….