Titre original : « Pay Day »
(Muet, 21 mn) Alors que son premier long métrage The Kid est déjà un très grand succès, Chaplin doit encore par contrat trois courts métrages à la First National. Ce seront des courts métrages dans l’esprit de ceux de la Mutual, c’est-à-dire un humour typé slapstick avec tout de même une légère connotation sociale. Ce Jour de paye est l’un des trois. Il est en deux parties. Dans la première, Chaplin est ouvrier d’un petit chantier de construction. Plusieurs scènes sont ici assez remarquables, notamment celles où il joue avec le monte-charge et celle où il montre une étonnante dextérité pour attraper à la volée des briques qui sont lui sont lancées. La seconde partie est plus classique : après avoir dépensé sa paye dans bar, il s’efforce de renter chez lui passablement éméché. Chaplin reprend ici le personnage de l’homme ivre, personnage qu’il connait bien puisque c’est celui qu’il interprétait sur scène à Londres dix ans auparavant et qu’il a repris de nombreuses fois. Il arrive toutefois toujours à trouver de nouveaux développements de gag. Globalement, on peut déceler un certain désenchantement derrière l’humour : la vie de cet ouvrier est loin d’être attrayante. Il doit beaucoup encaisser… Jour de paye a la réputation d’être le meilleur court métrage de Chaplin (1) ce qui, personnellement, me semble loin d’être le cas mais il reste très plaisant.
Elle: –
Lui :
Acteurs: Charles Chaplin, Phyllis Allen, Mack Swain, Edna Purviance
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Remarque :
* Notons que lorsque Jour de paye sort sur les écrans, la Prohibition est déjà en place depuis deux ans.
(1) Cette réputation doit certainement beaucoup au fait que Chaplin ait un jour déclaré que Jour de paye était son court-métrage favori…
EN ATTENDANT VERDOUX
«Tu as rendu avec tes doux yeux de chien
L’Amérique humaine
Et humain l’Américain »
Raffaele Carrieri (L’hirondelle Charlot. 1957)
Il a dépassé la trentaine. Sa renommée est phénoménale. Il tient, depuis 4 ans, toutes les rennes de ses films. On dit que ce fut son court métrage préféré. Peut être parce que- fait rare dans son œuvre- ce «Jour de paye» finit mal. Sans espoir. Le vagabond, qui, du reste, ne l’est pas vraiment, ici, retourne au «chagrin» de bon matin. Docile et soumis à son horrible mégère d’épouse et envers son insupportable gros petit chef de chantier. Y-a-t’il un espoir pour la classe ouvrière ? Le bonheur existe-t-il dans une chaumière et un cœur ? Certes, il a déjà rêve à tout ça (Une vie chien, Le Vagabond/Tramp). Mais là, Charlot ne rêve plus…
Si il lui arrivé à d’être marié, c’est uniquement pour être accablé d’une femme impossible. Chez Chaplin, si bonheur conjugal il y a, c’est pour après le carton « FIN ». Sauf chez Mr Verdoux. Mais, alors là, ce bonheur se payera au prix de la vie des autres mégères et de Charlot lui-même allant à l‘échafaud. De tout ou presque Verdoux nous venge !
Mais rassurons-nous. Plus que jamais le « p’tit gars » est décalé. Inapte et réfractaire à la Société. Il offre une fleur au contremaître, parce que la fille de celui-ci est jolie. Il ne parvient à monter dans le tram parce que la foule, inconsciente, anonyme et brutale, l’en empêche comme elle l‘empêche de s‘intégrer. Enfin parvenu chez lui, une multitude de chats lui interdit de prendre son repas..
Rassurons nous encore. Cet époustouflant numéro de main à main pour monter et placer de briques, constitue l’un de ses ballet les plus prodigieux de « mécanique humaine ». Idem avec les va et vient du monte-charge du même chantier. Quoique dans ce dernier exemple, il en va (et vient) il est surtout question de survie.
Plus encore que dans le « Kid » et «Charlot et le masque de fer» («Idle class ») que le précèdent, et moins que dans «Le Pèlerin» qui le suit, dans ce « Jour de Paye » de 1922, juste avant la série des chefs d’œuvre pour la United Artists (1923/1952), Chaplin/Charlot s’interrogent. Nous interrogent.
Ce court détour par une sorte de littérature nous avertit. Il convient désormais de traverser le miroir. Vers l’Art cinématographique. Le Cinématographe. Egalement vers la dénonciation d’un monde inhumain. Avec « ses yeux doux ».
Bien sûr, Chaplin, producteur, scénariste, monteur,musicien et acteur principal, tenait toutes les rênes de ses films. Il n’élevait pas un troupeau de rennes pour autant. Toutes mes excuses.
:-)))
Merci pour vos commentaires…