Titre original : « Red River »
Lui :
Ce premier western d’Howard Hawks est basé sur un fait historique : le premier convoyage d’un gigantesque troupeau depuis le Texas jusqu’au Kansas. C’est l’ouverture en 1867 de la piste appelée « Chisholm Trail » qui eut des conséquences économiques importantes en ce lendemain de Guerre Civile : invendable au Texas, le bétail manquait plus au nord. La Rivière Rouge est l’un des premiers westerns qui introduit une bonne dose de psychologie dans son récit. Il y a d’abord ce personnage autoritaire et borné, admirablement personnifié par un John Wayne qui lui donne une vraie dimension (1), les relations d’amour/haine/compétition qu’il entretient avec son fils adoptif (Montgomery Clift dont c’est ici le premier film)(2), ou encore les diverses allusions symboliques. Le western acquiert ainsi une autre dimension. Il faut aussi souligner la très belle photographie de Russell Harlan, en noir et blanc, avec de nombreuses scènes de nuit. Après une sortie retardée (3), La Rivière Rouge fut un beau succès commercial. Il apparaît de façon indéniable comme l’un des westerns majeurs.
Note :
Acteurs: John Wayne, Montgomery Clift, Joanne Dru, Walter Brennan, John Ireland
Voir la fiche du film et la filmographie de Howard Hawks sur le site IMDB.
Voir les autres films de Howard Hawks chroniqués sur ce blog…
Remarques :
(1) John Ford après avoir vu le film aurait dit à propos de John Wayne : « Je n’aurais jamais cru que ce grand con pouvait vraiment jouer » (« I didn’t know the big son of a bitch could act! »)
(2) On peut penser que la tension entre John Wayne et Montgomery Clift a probablement servi le film car, comme dans le film, tout les oppose dans la vraie vie, que ce soit sur le plan politique ou personnel. John Wayne n’appréciait guère l’homosexualité de Montgomery Clift et aurait même tenté de le faire renvoyer.
(3) Le film fut tourné en 1946 mais ne sortit qu’en 1948.
Après les westerns « classiques » des années 20-30, disons le, le souvent un tantinet simplistes, apparaissent enfin dès 1939 des films plus fouillés, où la psychologie des personnages devient important. Si the Big Trail de R Walsh était précurseur dans son genre, son échec renvoya le western dans le genre mineur ; jusqu’à Stagecoach de Ford. Red River étonne à la fois par son souffle épique, la relation pére-fils quasi fusionnelle, et bien sur le personnage campé par Joanne Dru, personnage très Hawksien qui rappelle Jean Arthur dans Angels Have Wings et qui préfigure A. Dickinson dans Rio Bravo. A noter que, d’après les rumeurs, Hawks et Ireland couraient tout les deux après l’actrice principale, et que si le rôle d’Ireland a été quelque peu coupé au montage par Hawks, c’est finalement lui qui a gagné la fille…en devenant sa femme.
Wayne prouve aussi qu’il pouvait sortir de ses rôles un peu monolithique, et se prépare ici à son plus grand rôle, dans the Searchers.
Un grand classique en tout cas.
« ‘Stagecoach’ (« La Chevauchée fantastique ») established me as a star ; « Red River » (« La Rivière rouge ») established me as an actor. » (John Wayne). C’est avec ce film que la stature de Duke Wayne prit une autre dimension. Si l’on célèbre à juste titre « La Rivière rouge » comme l’un des plus grands westerns de l’Histoire du Cinéma (Henri Agel le considérait d’ailleurs comme le tout meilleur western jamais réalisé), si l’on souligne à bon droit la qualité de la réalisation (Hawks), de la photo (Harlan), de l’interprétation (Wayne, Clift, Brennan, Dru, Ireland…), de la musique (Dimitri Tiomkin), on oublie assez souvent, pour ne pas dire presque toujours, que ce film s’appuie d’abord sur une histoire signée Borden Chase, l’un des tout meilleurs écrivains de westerns. C’est à lui que l’on doit notamment le scénario de films aussi réussis que « L’Homme qui n’a pas d’étoile » (King Vidor), « Winchester ’73 », « Les Affameurs », « Je suis un aventurier » (Anthony Mann), « Vera Cruz » (Robert Aldrich), « Coup de fouet en retour » (John Sturges), pour ne citer que quelques titres. La fin de « La Rivière rouge » continue d’alimenter les discussions. Nombreux sont ceux qui la jugent faible (Borden Chase l’avait imaginée différente) tandis que d’autres au contraire apprécient sa tonalité éminemment hawksienne, célébrant l’amitié virile dans un élan réconciliateur. Quoi qu’il en soit, le thème du Cattle Drive n’a jamais été aussi bien traité à l’écran que par Howard Hawks. Dans son film « The Last Picture Show », Peter Bogdanovitch utilise un extrait de « La Rivière rouge » (la fin justement, si mes souvenirs sont exacts) projeté dans une salle de cinéma d’une old western town poussiéreuse et désertique à souhait.Ce sera le dernier film que l’un des personnages principaux, joué par le tout jeune Jeff Bridges, voit avant de partir à l’armée. La dernière séance, quoi…
Superbe film.
Le trio Wayne-Montgomery-Dru est excellent (quelle beauté, cette fille !).
Seule la fin m’a un peu déçu : j’aurais bien apprécié quelque chose de plus tragique, plus en rapport, selon moi, avec le degré de haine atteint par le personnage du père adoptif interprété par Wayne : je l’aurais bien vu mourir de la main de son fils adoptif, victime ultime de ses pulsions destructrices.