Titre original : « The birth of a nation »
Premier titre original utilisé : « The clansman »
Lui :
Naissance d’une Nation est la première grande production du cinéma américain, marquant le début de la suprématie d’Hollywood sur le cinéma mondial, jusque là dominé par le cinéma français. C’est aussi l’un des films les plus litigieux de toute l’histoire du cinéma. Librement adapté de deux romans de propagande raciste de Thomas Dixon, le film de D.W. Griffith retrace la Guerre de Sécession et la reconstruction qui suivit avec une vision sudiste et ouvertement anti-noirs. Le Ku-Klux-Klan y est ainsi montré comme une réaction légitime et salutaire face à un nouvel ordre chaotique mis en en place par des noirs dévoyés et avides de pouvoir. Quand il est sorti, soit cinquante ans après la fin de la guerre civile, le film occasionna des émeutes à New-York et dans d’autres villes (1). Il a ensuite servi d’outil de propagande à une droite extrême pendant des dizaines d’années. Il faut donc le regarder en dépassant les aspects plutôt révoltants de son contenu.
Sur le plan cinématographique, Naissance d’une Nation est une révolution, pas tant par sa durée de 3 heures ou par la taille de sa production (2), mais surtout sur le plan artistique : c’est le premier grand film d’auteur. La création de scènes émotionnellement fortes, la ponctuation formée par les scènes historiques minutieusement reconstituées (l’assassinat de Lincoln au théâtre Ford, la bataille de Petersburg, l’incendie d’Atlanta, la reddition de Lee, etc…), la perfection du montage en font une œuvre à part entière et un grand spectacle dramatique (3). Le film comporte de nombreuses scènes de toute beauté. Naissance d’une Nation eut une influence considérable sur le cinéma américain et son développement (4). Il est étonnant de voir comment il conserve toute sa force aujourd’hui, presque un siècle plus tard.
Note :
Acteurs: Lillian Gish, Mae Marsh, Henry B. Walthall, Ralph Lewis, George Siegmann
Voir la fiche du film et la filmographie de David W. Griffith sur le site IMDB.
Voir les autres films de David W. Griffith chroniqués sur ce blog…
(1) Les incidents firent des blessés et même des morts. Du fait de la présence des troupes coloniales au front, le film ne sortira en France qu’après la guerre, en 1920 et largement coupé. Il n’est jamais sorti en Russie donc son influence sur le cinéma russe est probablement nulle malgré certaines affirmations. D.W. Griffith fut très affecté par les attaques portées contre lui : il tournera l’année suivante Intolérance pour se racheter et dans le film suivant, Coeurs du Monde, il montrera un soldat blanc et un soldat noir qui s’embrassent. A noter que Naissance d’une Nation est, comme plusieurs de ses films suivants, porteur d’un message anti-guerre très marqué, partie évidemment moins critiquable.
(2) Cabiria, film italien historique de Giovanni Pastrone sorti un an plus tôt, durait déjà presque trois heures. D’autre part, on sait aujourd’hui que les chiffres donnés à l’époque pour Naissance d’une Nation (18 mois de tournage, 18 000 figurants) étaient largement exagérés : le tournage n’a duré que 9 semaines et seulement 500 figurants ont été utilisés. Le résultat n’en est que plus remarquable…
(3) D.W. Griffith l’a lui-même précisé : aucun scénario n’a été écrit pour ce film (ni pour les suivants d’ailleurs). En revanche, les répétitions furent nombreuses. Les grandes scènes de bataille furent souvent tournées en une journée (à l’emplacement des futurs Studios Universal), les costumes furent en grande partie faits par la mère de Lillian Gish. A noter que tous les premiers rôles de noirs furent tenus par des blancs, grossièrement grimés.
(4) Les coûts de production ont été de l’ordre de 110 000 dollars (soit environ 1,5 millions d’euros d’aujourd’hui), Griffith ayant investi toute sa fortune personnelle. Alimenté par le scandale, le succès du film aurait généré au moins 20 à 50 fois cette somme. C’est le premier film où les salles ont pratiqué un prix majoré des places (2$ de l’époque, soit 25/30 euros d’aujourd’hui). Le film a ouvert les portes pour une vraie industrie : la création des grands studios est intervenue dans les 5 ou 10 années qui suivirent.
Remarques :
* Le membre du Congrès nommé Stevenson dans le film représente l’homme politique Thaddeus Stevens, leader de l’aile radicale du parti républicain pendant et après la guerre de Sécession.
* C’est Raoul Walsh, le réalisateur, qui interprète le rôle de John Booth, l’assassin de Lincoln. Il s’est réellement fait très mal en sautant du balcon, c’est la raison pour laquelle il boite ensuite en s’éloignant. Il n’y eut qu’une seule prise…
Durée :
185 à 190 min pour la version originale et celle disponible couramment en DVD.
Il existe une version video de 125 min, également retranscrite sur certains DVD.
Toutes les versions disponibles n’ont pas les teintes d’origine (certaines scènes de guerre étaient teintées en rouge par exemple, cette teinte a d’ailleurs mal vieilli, de nombreuses autres scènes sont teintées en ambre, en bleu ou en violet).
La suprematie de Hollyvood.En peut pas la nier.Toutes ses grandes films sont publicitées par tout le monde et vues par millions de personnes.J´ai vu quelques films médiocres entre eux,même que des bonnes La suprematie de Hollivood est une suprematie d´argent,dirais moi.Autres paradises du cinema ont la suprematie du bon goût,que méprise l´argent.
A mon avis,le cinéma europeenne doit oublier las super-productions et renaître ses ambitions artistiques.Il faut éduquer aux spectateurs dans la culture du bon cinéma et renoncer aux bénéfices économiques moyennant l´aide publique.Le cinéma est un art,pas un négoce,au moins à l´europe.Il y a des bons acteurs,actrices et directeurs qui l´ aiment vraiment et qui sont disposés à travailler pour la création sur toutes les choses.L´amateurisation peut être la salvation du cinéma.
« La naissance du n´importe quoi » pourrait rétorquer de concert.
Ce film a eu lieu à une époque où le pouvoir colonial, alors à son apogée, n´avait aucune espèce de retenue chrétienne et humaniste, paradoxe intrinsèque de sa face cachée, volonté de puissance sous auspices hypocrites de mission civilisatrice, à s´adonner une abjecte, néanmoins ridicule dans son intention narcissistement infantile, idéologie de la suprématie dite biologique du phénotype, « de la peau plus claire que… ».
Comme si la teneur en melanine, pigment responsable de la coloration de la peau, et son équivalent génique, eût eu quelque relation fondamentale à des différences notoires et substantielles en capacités intellectuelles, éthiques et esthétiques entre divers groupes humains, répartis il y a si longtemps sur notre planète, selon les contingences de la nature.
Aujourd´hui le jeu de cartes à l´échelle mondiale est complètement remanié. Une simple observation de l´avènement de la Chine, réveillée d´un sommeil induit, et son rôle majeur en économie et géopolitique, nous conduit, non sans ironique distance, à se convaincre désormais de l´innanité de tels discours, si en vogue à cette époque.
Notons par la même occasion le caractère toutefois insolite et sado-masochiste d´une idéologie raciste qui a conduit elle-même à des boucheries invraisemblables sur le sol européen, à l´élévation quasi satanique d´autels où toute libation ne fût en vérité que sacrifice hallucinant d´une jeunesse qui n´aspirait qu´à vivre sa vie comme elle se le doit, sous le regard malfaisan, froid et cruel de « généraux » atteints de décrépitude morale et physique mais néanmoins imbus de délire chauviniste.
Quelle honte.
Oui, le film a exactement 100 ans ce mois-ci (la première a eu lieu le 8 février 1915).
Comme le souligne l’article du blog Big Browser mentionné ci-dessus, Naissance d’une Nation cause et continuera de causer un certain embarras. Si son propos est franchement nauséabond, ce n’en est pas moins l’un des films fondateurs du cinéma hollywoodien.
Le fait que son propos soit abject prouve la puissance du cinéma : il se montre apte à faire passer des idées les plus contestables ou, pire encore, de vous faire partager des émotions qui sont contraires à vos idées. Pour un peu, on se verrait applaudir à l’intervention du Ku Klux Klan… c’est terrifiant!
Le film a permis de mesurer l’impact du cinéma : on peut se dire qu’il a donné des idées à certains de l’utiliser à des fins de propagande mais on peut aussi penser qu’il a montré qu’il pouvait être dangereux de manier des idéologies imprécises ou douteuses (c’est mon côté optimiste dans ma vision de la nature humaine qui me fait dire cela). On pourrait dire qu’il a montré ce qu’il ne fallait pas faire…
Mais, quoi qu’il en soit, il fait partie de l’Histoire du cinéma. Faut-il le qualifier de chef d’oeuvre ? Il faudrait d’abord définir ce que l’on entend par chef d’oeuvre. S’il s’agit d’une oeuvre qui est parfaite, qui n’est plus perfectible, alors non, le film n’en est pas un à cause de l’idéologie véhiculée. S’il s’agit d’une oeuvre qui a eu une influence considérable sur tous les cinéastes, alors oui c’en est un.