Titre original : « The Age of Innocence »
Dans la haute société new-yorkaise de 1870, Newland Archer est fiancé à une jeune fille de bonne famille dont la cousine, qui vit séparée de son mari, un comte polonais, est l’objet de réprobations du fait de son anticonformisme et de son indépendance… Le Temps de l’innocence est un film qui peut surprendre dans la filmographie de Martin Scorsese. Le réalisateur a été fasciné par l’extrême complexité et la rigidité des codes sociaux de cette haute bourgeoisie et s’est appliqué à recréer son univers avec toute l’opulence des décors et des objets. Il fait de nombreux gros plans courts sur des détails pour bien nous en montrer toute la richesse. Son film n’est pas sans nous faire penser à Visconti, que Scorsese admire tout particulièrement. Hélas, ses personnages semblent bien vides et ne présentent guère d’intérêt. Dès lors, il est bien difficile de partager les tourments de ce dandy écartelé entre deux femmes symbolisant deux mondes différents, l’un auquel il appartient et l’autre auquel il aspire. Finalement, nous observons tout cela avec détachement, avec un regard presque ethnologique…
Elle: –
Lui :
Acteurs: Daniel Day-Lewis, Michelle Pfeiffer, Winona Ryder, Geraldine Chaplin, Stuart Wilson
Voir la fiche du film et la filmographie de Martin Scorsese sur le site IMDB.
Voir les autres films de Martin Scorsese chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Martin Scorsese…
Huit repas jalonnent le film…
Au contraire! Scorsese montre à merveille le piège des conventions et préjugés qui empêchent la réalisation du désir! Un film profond et magnifique.
100% d’accord avec marcantoni. Ce film est l’un des deux ou trois plus grands de Scorcese. Outre la beauté intrinsèque des plans et des images (somptueux !!), ce qui est remarquable est que Scorcese prend ici le contre pied de son cinéma habituel. Alors qu’il filme toujours des personnages qui vont au bout de leurs rêves et de leur folie quitte à s’y bruler totalement (d’où sa fascination pour les mafieux), il choisit ici de s’intéresser à la grande majorité des gens qui passent à coté de leur existence, parce que pris au piège de leurs peurs, de leurs convenances et des règles de la société. Immense film « sautien », car comme comme Claude Sautet, Scorcese décrit le pathétique et le dérisoire de nos vies qui passent à coté des choix que nous devrions faire parce qu’ils correspondent à nos désirs profonds…. et que nous ne ferons jamais. « Jamais au bon endroit au bon moment avec la bonne personne », condamné à expier dans un confort douteux nos manques de courage. Cette réalité est évidemment peu confortable, d’où le rejet de ce film par de nombreuses personnes, d’autant qu’au contraire de Sautet, ici pas de compensations par l’amitié des hommes,… la solitude absolue du personnage magnifiquement joué par Day Lewis est immense et proprement insupportable. C’est le film le plus tragique de Scorcese.
Des PAGES aux IMAGES
En 93 ce temps de l’innocence a suscité bien des commentaires comme il en subsiste encore aujourd’hui par rapport aux chemins cinématographiques de Scorsese. Effectivement autour de son quinzième long métrage, le cinéaste surprend son monde avec un choix proustien d’adapter le romanesque et cruel roman d’Edith Warton qui fut avec ce livre la première femme a recevoir le prix Pullitzer. Là où on attendait Visconti ou Ivory, Scorsese nous transmet fidèlement sa passion pour cette oeuvre, cette société aristocratique et ses codes dans ce New-York d’avant, fin 19ème, où règnent préjugés et morale, nous livre cette passion brûlante et de moins en moins secrète entre deux solitudes, passion impossible qui ne sera jamais consommée charnellement. De ce récit retranscrit en images et sons, Scorsese fait son miel. Comme souvent chez lui une voix off (ici féminine et associée à l’auteure, narratrice témoin – voix de Joanne Woodward dans la VO -) nous informe des us et coutumes autour du trio principal de personnages magnifiquement interprétés par Daniel Day Lewis (Lui), Wynona Ryder (Elle, sa future femme, puis sa femme) – Scorsese joue le temps d’une séquence le photographe de ce mariage – et Michèle Pfeiffer (la comtesse polonaise, cousine de la mariée, de retour d’Europe après sa séparation « scandaleuse »‘avec son mari, et par qui le scandale, possible et redouté du restant des deux familles, risque d’arriver). Tout se joue dans cette partie de dés entre conventions et désirs. Ce pourrait être une pièce de théâtre, du reste le film fait allusion à celui-ci plusieurs fois. La grande séquence d’ouverture qui nous introduit dans cette société opulente et corsetée, de l’opéra à la réception chez les nantis et au bal qui s’en suit – l’univers des apparences – est à couper le souffle de beauté et de créativité (photo de Michael Ballhaus et équipe artistique de Dante Ferretti) où foisonnent dans un cinémaScope couleurs d’une grande brillance (à voir absolument sur grand écran) les surimpressions, les fondus au rouge, blanc, jaune, les caches et les iris, les plans séquences en apesanteur qui vont perdurer. Scorsese s’attache à dépeindre de plus en plus serrés et feutrés l’émergence des sentiments amoureux et ces atermoiements du coeur. Dans ce carcan du grand monde où tout est dans le caché-montré, le simple retrait d’une paire de gants dans un fiacre revêt une intensité érotique. « Le temps de l’innocence » allie la perfection formelle, une remarquable direction d’acteurs, la loupe sur les moeurs d’une ville qui allait devenir plus tard celle des Gangs, de Taxi driver ou des Affranchis entre autres, et le faste de la super production de studio. Ce déploiement nous est offert dès le générique (Saul Bass) lors d’une série d’éclosion de roses d’abord au ralenti puis de plus en plus rapidement dans une superposition de dentelles et d’écritures victoriennes sur une partition soyeuse d’Elmer Bernstein.
A l’arrivée bonnes manières extérieures et machinations internes auront raison de notre trio.
Ce temps de l’innocence là en est à sa troisième version cinéma après une muette en 24 et une parlante en 34
Bonjour. Connaissez – vous le nom de l’actrice qui doublela voix de la narratrice en français? Impossible de trouver. Merci
E
L’actrice qui double la narratrice (Joanne Woodward en anglais) est Martine Sarcey qui double aussi souvent Julie Andrews et Audrey Hepburn (ainsi que Samantha, ma sorcière bien aimée) https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Martine_Sarcey