Elle :
Un film immensément triste et émouvant, une histoire de solitude profonde presque atemporelle qui nous plonge à mi-chemin entre réel et imaginaire. Un enfant presque abandonné est confié à un oncle dépressif et alcoolique qui l’ignore tant son chagrin d’amour est profond. Cette indifférence et incommunicabilité entre des êtres a priori proches est souvent le ressort des films asiatiques contemporains. 4:30 est un film quasiment muet qui mise sur les images dépouillées, les portraits de toute beauté, les regards et les larmes, les éclairages subtils, une musique éthérée pour faire passer les émotions et cette lente marche vers l’isolement total. Un déchirement pour cet enfant orphelin des hommes.
Note :
Lui :
Un jeune garçon singapourien vit quasiment seul dans un appartement, avec un oncle coréen dépressif qui l’ignore totalement. Sa mère l’appelle tous les matins pour vérifier qu’il part à l’école. 4:30 est un film sur la solitude, la solitude de cet enfant qui cherche à parler à cet oncle qui est le seul lien familial auquel il puisse tenter de s’accrocher, et la solitude de cet oncle, qui noie le chagrin d’une séparation douloureuse dans l’alcool et les barbituriques et qui se mure dans une absence totale de communication. Tout le film est donc construit autour de ces deux personnages : il se déroule quasiment sans paroles, une façon pour le réalisateur de s’affranchir des barrières culturelles et ainsi donner une certaine universalité à cette double solitude. Sans nous donner toutes les clés pour comprendre (1), le singapourien Royston Tan filme avec une certaine lenteur qui n’est cependant jamais pesante, c’est là l’expression d’un vrai talent car il parvient à rendre cette histoire particulièrement touchante. Elle est aussi assez terrible.
Note :
Acteurs: Xiao Li Yuan, Kim Young-jun
Voir la fiche du film et la filmographie de Royston Tan sur le site imdb.com.
(1) Il n’est pas évident de comprendre que l’enfant et l’oncle ne parlent pas la même langue. On remarque bien, au moment où l’oncle va acheter une glace, qu’il parle au vendeur par gestes et il y a aussi la scène de l’escalier où il prononce enfin quelques mots à son neveu ; mais cela ne saute pas aux yeux. De plus, pour nous occidentaux, on ne peut voir que le petit mot laissé avec le pot de nouilles (« Je pars » ?) est écrit en autre chose que du chinois. Tout comme, nous ne pouvons reconnaître physiquement un coréen d’un singapourien (en supposant que cela soit possible, ce dont je ne suis pas certain).
Petite précision: je connais (un peu) Singapour pour y être allé plusieurs fois alors SVP ne dites pas que l’enfant est chinois mais singapourien. Cela a son importance car c’est un film sur la société singapourienne.Les enfants y sont amenés à se débrouiller très seuls très tôt. L’école finit en fin de matinée ou tout début d’après-midi et il n’est pas rare de voir des gamins en uniforme rentrer chez eux alors que les parents sont absents jusqu’en début de soirée. On voit souvent des jeunes ados se ballader dans les centres commerciaux pour tuer le temps ou y faire leurs devoirs dans les fast foods!
En l’occurence, le film met ici en relief un autre aspect de la société à savoir qu’il y a 25% d’immigrés (1 million sur 4) dans la société et que la démographie est un gros défi pour Singapour qui a l’un des taux de natalité les plus faibles au monde.
Dernier détail: quand le film est sorti, il me semblait aovir compris que l’oncle est en fait son père en situation illégale mais que la famille le cachait à l’enfant…
Merci pour ces précisions et commentaires qui sont très intéressants (et j’ai corrigé mon imprécision)…
A l’occasion, en faisant quelques recherches, j’ai vu que le problème des langues était assez aigu à Singapour. Il y a 4 langues officielles. Les langues d’usage courant se partagent entre l’anglais, le mandarin et divers dialectes chinois. Dans ce film, nous avons été surpris de voir qu’à l’école, les cours étaient en anglais.