13 juillet 2007

Rocco et ses frères (1960) de Luchino Visconti

Titre original : Rocco e i suoi fratelli

Rocco et ses frères Elle :
Rocco et ses frères arrivent de leur campagne lointaine d’Italie du Sud pour s’installer à Milan : chômage, misère, mauvaises rencontres ponctuent leur vie. Difficile de résister aux tentations destructrices. C’est une vision assez pessimiste de l’Italie que nous offre ici Visconti.
Note : 4 étoiles

Lui :
Rocco et ses frères Visconti nous offre sa vision de l’Italie du sud, une vision sombre et tragique mais sans doute réaliste en cette fin des années 50. Sombre car les perspectives d’ascension sont assez difficiles et longues, les sirènes de l’argent facile (par la boxe par exemple) les rendant bien ternes. Tragique car la passion et le drame viennent embrumer encore plus les perspectives de ces cinq frères et feront perdre à deux d’entre eux tout contrôle sur leurs vies. Ce sont d’ailleurs ces deux personnages, Rocco et Simone, qui donnent toute leur force dramatique au film, le destin des trois autres, qui s’en sortiront mieux, est traité par Visconti avec beaucoup plus de distance. L’interprétation est magnifique, bien que de nombreux acteurs soient doublés : Annie Girardot, Roger Hanin, et le jeune et beau Alain Delon dont la carrière prendra son réel envol grâce à ce film.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Alain Delon, Renato Salvatori, Annie Girardot, Roger Hanin, Claudia Cardinale
Voir la fiche du film et la filmographie de Luchino Visconti sur le site imdb.com.

Voir les autres films de Luchino Visconti chroniqués sur ce blog…

8 réflexions sur « Rocco et ses frères (1960) de Luchino Visconti »

  1. Merde alors ! Rocco et ses frères ne décroche pas les 5 étoiles ! Battu, selon vos critères, par (au hasard) la Neuvième Porte de Polanski, ou Merci pour le chocolat de Chabrol et à égalité avec Robots de C.Wedge ! Mdr ! Bon je m’en remettrai ; Telerama a bien raté la note maximum pour le Voyage à Tokyo d’Ozu. ça relativise finalement les critiques concernant son propre travail, quelqu’elles soient… Rocco, vu pour la première fois pendant mon adolescence, figure dans mon panthéon. C’est l’une des oeuvres qui m’a poussé à me lancer dans une carrière artistique. Robots et La Neuvième porte sont certe plaisants mais n’ont pas la force esthétique et la puissance dramatique de Rocco. Pour les plus jeunes : si vous n’avez de Delon que l’image du vieux beau imbu de sa personne regardez ce film, vous comprendrez quel acteur il pouvait être quand il était dirigé par un génie du cinéma.

  2. :-)))
    C’est le gros avantage d’un blog et de ne pas être critique professionnel : nous pouvons parler de notre ressenti sans chercher à créer un classement ou une hiérarchie dans nos notes.
    C’est vrai que voir un film comme Robots mis à égalité d’un film de Visconti peut faire sourire… Ces notes traduisent plus l’intérêt ou le plaisir immédiat sur un film donné. Nous n’avons pas la prétention de chercher à noter les cinéastes ou d’écrire des articles de fond.

    Si notre petit blog peut donner envie de voir (ou de revoir) des films comme Rocco et ses Frères, j’en serais ravi.

    Sinon, vous avez raison pour Delon. Avant qu’il ne se mette à tourner des films au kilomètre (donc avant 1970 en gros), c’était un acteur fabuleux.

  3. A quand un point de vue sur  » Décaméron  » de Pasolini qui nous redonne le goût de la beauté de ce pays.
    Pasolini même avec des films néo-réalistes comme  » Accatone  » sait nous rendre la joie de vivre de ce peuple méditerranéen.
    Et, vous le négligé ? !

  4. Moi, le négligé ? Hum… non, moi je serais plutôt « pyjama »… :-)))

    Sérieusement : nous ne négligons pas Pasolini… Je ne pense pas être prétentieux en disant que nous avons vu tous ses films… il y a un certain temps.
    Je dois bien avouer avoir quelques craintes à les revoir maintenant, surtout ceux des années 70. Je commencerais plutôt par Accatone comme vous le suggerez ou Mamma Roma. 😉

  5. Je viens de revoir « Rocco et ses frères » et je trouve ce film toujours aussi prenant et les principaux personnages très attachants. Les acteurs sont tous formidables mais une question se pose : bien sûr le film est d’un réalisateur italien donc on pense tout de suite dialogue en italien, mais quand il s’agit d’acteurs français n’est-il pas intéressant de voir le film en version française (je préfère entendre Delon parlant français plutôt que doublé en italien) ?
    Vos notes donnent toujours envie de voir les films. Merci !

  6. La question que vous vous posez est effectivement un vrai problème pour les productions multinationales des années 60 et 70.

    La version la plus originale, celle qui a été tournée par le réalisateur, est sans aucun doute toujours préférable mais quelquefois il n’y en a même pas ! (quand le film a été tourné sans le son et post-synchronisé ensuite, cas assez fréquent dans le cinéma italien à une certaine époque). Ensuite, quand le doublage a été réalisé par le réalisateur lui-même, le résultat est certainement intéressant.

  7. TRAGEDIE ANTIQUE

    Voilà donc la famille Parondi, originaire du sud rural et pauvre de l’Italie, en deuil du père, qui migre de l’intérieur, comme beaucoup à cette époque (la toute fin des années cinquante dans une phase transitoire entre un gouvernement de centre droit et un de centre gauche) pour « monter » à la grande cité riche du nord et la plus avancée du pays dans l’espoir de tout recommencer à zéro et surtout de sortir de la misère en trouvant du travail et d’abord un logement. La voilà qui débarque dans l’immense gare de Milan et dans la grande ville où les lumières d’abord les éblouissent comme un mirage, jusqu’à sa banlieue urbaine du quartier de Ghisolfa, Avec en tête de ce clan familial la fière mamma, la veuve Rosaria, dominatrice et énergique qui la soude avec ses cinq fils comme les cinq doigts de la main. Cet exil de l’intérieur – où ces gens du sud sont perçus comme des étrangers et non des concitoyens dans leur propre pays par ceux du nord – est le point de départ de ce film fleuve de 3 heures, comme l’était déjà LA TERRE TREMBLE dont ce film peut être vu comme le second épisode d’une chronique.
    Ils se sont mis à cinq – comme les frères – pour écrire ce scénario original, complexe et ample (qui s’inspire de l’extrait d’une série de nouvelles) à la structure romanesque découpée en cinq parties (chapitres) portant chacune le prénom de chaque frère en partant de l’aîné jusqu’au cadet sur qui reposera à la fin un futur possible de la vie de la famille Parondi
    Comme pour LA TERRE TREMBLE on retrouve le mélange du réalisme sec d’un documentaire social à celui d’une fiction exacerbée des sentiments et affects humains de chaque personnage, dans un style raffiné en noir et blanc superbe (photo de Giuseppe Rotunno) qui loin d’altérer le sens et la portée du sujet lui suscite au contraire sa véritable portée tragique digne d’une tragédie antique avec des séquences de violence paroxystique (qui affolera la censure et ses grands ciseaux) amenant la défaite des trois personnages principaux (Visconti ne s’en est pas caché, il a voulu ces outrances de jeu qui font éclater le cadre traditionnel au sens figuré et celui de la famille au sens propre). Il faut parler ici de l’interprétation de ces trois personnes focalisée autour de Rocco qui donne son titre au film – Alain Delon, central et magnifique, sur qui la caméra de Visconti s’approche au plus près, comme déjà venait de la faire celle de René Clément pour PLEIN SOLEIL, vraiment une découverte majeure – ange blessé au chemin christique, sorte de saint qui soutient et absout jusqu’au bout malgré tout et les autres son ainé Simone – Renato Salvatori extraordinaire en ange noir maléfique et dont ce sera le meilleur film – et la femme entre les deux hommes, Nadia la prostituée – Annie Girardot, grandiose – point de perte de l’équilibre de tout cet édifice. Ces trois personnages, le boxeur, l’apprenti teinturier qui deviendra boxeur à son tour, et la prostituée vivent de et par leur seule richesse : leur corps.
    Tout cela finira on ne peut plus mal on s’en doute pour le trio alors qu’une échappée est envisagée comme possible pour le plus jeune encore pour le moment sous l’emprise du poids de la réalité historique, économique, sociale
    On imagine que ce film – superbement restauré 4K par la cinémathèque de Bologne en 2015 – a du frapper et influencer un cinéaste comme Martin Scorsese par ce cheminement d’ascension, de chute et de rédemption, digne de Dostoievski, de toutes ces âmes blessées.
    Jamais plus Visconti ne retournera un film de cette essence qui va pourtant pour la première fois lui ouvrir les portes du succès et de la renommée internationale

    J’ai lu vos échanges concernant VO et version doublée; à vrai dire de ce point de vue dans ce cas précis, aucune n’est satisfaisante, car en italien tous les nombreux acteurs français sont doublés par d’autres voix, ainsi que certains acteurs italiens aussi (!) et notre oreille est altérée, et en version française (seule version longtemps présentée en France), le dialogue et l’interprétation vocale subissent des modifications qui entrainent jusqu’à de l’incompréhension, c’est un débat sans fin!

  8. C’est un beau film avec de jeunes acteurs prometteurs. Mais c’est surtout katina Paxinou qui a retenu mon attention. Quelle grande actrice elle était. On sent derrière ce rôle de mamma dominatrice la grande tragédienne des tragédies grecques.

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