Titre original : Ace in the hole
Second titre américain : The big carnival
Lui :
Mis à la porte de grands quotidiens, un journaliste se retrouve dans un journal régional. Apprenant qu’un homme est coincé au fond d’une galerie partiellement effondrée, il voit là l’occasion d’avoir un scoop et de revenir sur le devant de la scène. Il prend en main les secours et arrange les choses selon son intérêt. Ecrit, produit et réalisé par Billy Wilder, Le gouffre aux chimères s’appuie sur un fait divers réel (1). Le film est un violent réquisitoire contre le journalisme à sensation et contre l’arrivisme : ce journaliste n’a aucun scrupule, il cherche à faire durer les opérations de sauvetage. Kirk Douglas livre une très belle performance, à la fois puissante et pleine de retenue, sans trop charger son personnage. Le résultat est assez magistral grâce aussi à une écriture parfaite du scénario. Le Gouffre aux Chimères fut un échec commercial retentissant ; les studios changèrent le titre mais rien n’y fit. Le public américain n’apprécia guère se voir ainsi montré car, au-delà du journaliste arriviste et sans éthique, le public est lui aussi visé, un public friand de fait divers tragique, de sensationnel, qui semble se repaître du malheur des autres. Le propos reste bien entendu toujours aussi actuel.
Note :
Acteurs: Kirk Douglas, Jan Sterling, Robert Arthur, Porter Hall
Voir la fiche du film et la filmographie de Billy Wilder sur le site IMDB.
Voir les autres films de Billy Wilder chroniqués sur ce blog…
(1) En 1925, le spéléologue Floyd Collins se retrouva coincé dans une galerie étroite d’un vaste complexe de grottes dans le Kentucky. Ce fait divers, qui s’acheva tragiquement quatorze jours plus tard par la mort du spéléologue, fut un gigantesque évènement médiatique, attirant des dizaines de milliers de curieux sur le site. Le journaliste local qui lança la nouvelle, participa aux opérations de sauvetage et réussit à interviewer la victime, reçut le prix Pulitzer. Son nom, William Burke Miller, est cité par le journaliste du film Le Gouffre aux Chimères qui est prêt à tout pour avoir une renommée semblable.
Tiens justement je revoyais ce film hier soir ! Comme les grands esprits se rencontrent ! Oui le film est excellent. mais c’est bien plus qu’une dénonciation du voyeurisme et de l’arrivisme. Car ici tout le monde joue un rôle et ne vise que des intérêts mesquins à court terme. Seuls les indiens se tiennent à l’écart de ce carnaval (en américain le film s’appelle « Ace in the hole » ou « The big Carnival »). Kirk Douglas est bien sûr très bon, il emporte le film avec sa fougue naturelle, mais Jan Sterling aussi dans cette pose d’une niaise cupide et prête à tout pour quatre ronds.
Je trouve aussi la photo très bonne : le noir et blanc donne une allure funèbre à des paysages grandioses. alors pourquoi le film n’a-t-il pas marché ? Sans doute il y a dans cette dénonciation de l’imbécilité de la foule quelque chose qui répugne aux bonnes consciences. Mais il y a tout de même des films noirs qui ont bien marché. Je me faisais la même réflexion en voyant « The molly maguires » de Martin Ritt : film excellent qui fut aussi un four en son temps. je crois que dans les deux cas c’est le manque d’espoir qui rebutte le public.
Au début il y a une scène où K. Douglas arrivant au journal admire une maxime brodée au mur « Dites la vérité ». « Je n’y arriverais jamais, dit-il » avec l’ambiguité de savoir si c’est de la broderie dont il parle ou de la vérité.
Un très bon Billy Wilder et un très bon Kirk Douglas dont la carrière remarquable doit ici encore être saluée.