Elle :
Dans ce premier film tourné exclusivement avec des acteurs américains, Wong Kar-wai se montre au sommet de son art puisqu’il parvient à fusionner l’esthétisme de son cinéma avec la trame émouvante de son scénario. On nage en plein éblouissement visuel, en totale volupté et mélancolie tandis que son personnage principal interprété par Norah Jones part en quête d’elle-même à travers l’Amérique suite à une rupture sentimentale. Ses rencontres lui révèlent des histoires plus fortes et tragiques que la sienne et lui font prendre conscience de sa véritable personnalité. Elles ont toutes lieu dans ces bars de nuit déserts aux éclairages diffus et colorés. Montage époustouflant, beaux éclairages, palette de teintes primaires subtiles, compositions élaborées, effets de flous et d’accélérés, jeux de reflets, de plans, de lettrages et de graphismes dans les vitrines et les rideaux pour montrer la solitude et l’enfermement. Wong Kar-wai contrairement à ses films précédents apporte une touche positive et une lueur d’espoir dans le destin de ses personnages. L’atmosphère et le scénario ont parfois des parfums de Wim Wenders et de David Lynch. La belle bande son de Ry Cooder, Cat Power et Norah Jones participe à cette ambiance envoûtante.
Note :
Lui :
My Blueberry Nights est le premier film américain du réalisateur hongkongais Wong Kar-wai qui prend un certain risque en bâtissant tout son film autour de Norah Jones, que l’on connaît plus en tant que chanteuse qu’en tant qu’actrice… Comme pour beaucoup de ses autres films, Wong Kar-wai place plusieurs histoires dans My Blueberry Nights, quatre histoires que va traverser son héroïne qui sort elle-même d’une rupture douloureuse. L’ambiance générale du film nous rappelle celle des films de Wim Wenders. La plupart des scènes se situent la nuit dans un bar, le plus souvent en dialogue, à deux personnes donc : Wong Kar-wai parvient à nous mettre très près de ses personnages, avec peu d’interférences du monde environnant, une sorte d’intimité que l’on a plus coutume de trouver au théâtre qu’au cinéma. La patte de Wong Kar-wai se montre aussi beaucoup sur la forme, avec ses compositions d’image très étudiées et ses trouvailles visuelles que l’on peut trouver trop ostensibles si l’on en croit les commentaires (généralement assez mauvais) de la Critique. Les cinq acteurs principaux font une très belle prestation avec une mention pour Natalie Portman qui montre, une fois de plus, la multiformité de son talent.
Note :
Acteurs: Norah Jones, Jude Law, Natalie Portman, David Strathairn, Rachel Weisz
Voir la fiche du film et la filmographie de Wong Kar-wai sur le site imdb.com.
Voir les autres films de Wong Kar-wai chroniqués sur ce blog…
Bonjour,
bravo pour votre blog. Je suis surpris que blueberry nights soit le film de WKW qui vous ai le plus accroché. Pour ma part j’ai trouvé que c’était son film le plus fade, la production américaine et toutes les contraintes qu’il en suit pour un auteur le ramène au « simple » rang de réalisateur. Je me suis posé la question s’il en avait eu conscience et du coup en avait joué ou bien s’il pensait vraiment développer son art sur ce film. J’ai trouvé dans ce film que toute la singularité de son cinéma fondait comme une crème glacée sous les projecteurs. L’utilisation de Norah Jones comme potiche est très réussi mais elle m’a vite fait regretter les personnages féminins si denses des autres films (Les anges déchus, 2046). Les effets saccadés d’un pré réglage numérique sont très loin des prouesses techniques des autres films (différence d’obturation sur un même plan-In the mood…) . Le montage feinte un style à la manière de alors qu’il est très loin de rompre la structure organique. Rupture qui est une des raisons du cinéma de WKW. Mais est-il possible de casser l’organisme en étant produit par Hoolywood, le maître de la Monoforme? Je ne pense pas et j’aimerai savoir si WKW y a cru ou non. Néanmoins il s’est montré un très bon réalisateur.
Mention spéciale à Nathalie Portman qui arrive à tirer le film vers une sensation de perte de contrôle pour le spectateur, ce qui nous rapproche vraiment du cinéma de WKW.
Alors que Les anges déchus m’a provoqué un sentiment très fort et un souvenir assez marqué My Blueberry Nights ne m’a pas fait passer un mauvais moment au cinéma, sans plus, surement autant que ses intentions( myrtilles et crème glacée…)
Pas mon préféré du réalisateur, film inégal à mes yeux, mais je le trouve tout de même passionnant, et dans une vraie prise de risque. Heureux en tout cas de lire deux avis enthousiastes sur un film qui me paraît surtout sacrifié à l’autel de « brûlons ce que l’on a aimé ». Bref, ce n’est que mon avis, mais la violence récurrente du rejet qu’il subit souvent ne m’a encore jamais paru avoir si grand rapport avec le film lui-même, comme cela arrive régulièrement…
En effet, ce film est loin d’être le meilleur de WKW. C’est un peu du WKW qui fait du WKW en se regardant faire du WKW. Au royaume des remake, on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Mais si ça ouvre le public américain à certaines richesses qu’ils sont incapables de découvrir si elles ne sont pas « inculturées », c’est sans doute tant mieux…