Elle :
Début des années 70, des meurtres de femme intriguent un petit village provincial du Périgord. Une histoire d’amour pas si incompatible naît entre une belle institutrice Hélène, femme libre et cultivée et Popaul, un boucher frustre, traumatisé par le sang de la guerre. Chabrol déploie tout son art pour mettre en scène des scènes provinciales authentiques, notamment un mariage avec des personnages bien typés. Il fait évoluer parallèlement l’enquête policière, l’histoire d’amour et la suspicion qui naît peu à peu autour du boucher, de façon sobre et épurée. Le rouge se fait de plus en plus présent dans les décors avec la goutte de sang de la victime qui tombe sur la tartine d’une écolière, le gigot offert comme un bouquet de roses, la robe rouge de Stéphane Audran. La tension monte en intensité. Peu de dialogues, des regards, une musique très contemporaine et étrange dans ce cadre rural, un certain attendrissement devant Popaul malgré sa barbarie suffisent à créer un climat angoissant. Le Boucher est un très bon film à ne pas manquer.
Note :
Lui :
Mêlant un décor paisible et presque idyllique de province à une affaire sordide de meurtre, Chabrol réussit une œuvre quasi parfaite avec Le Boucher. Il crée un climat tout en ambivalence avec des images rassurantes qu’il place en décalage par notamment l’utilisation d’une bande sonore plus stressante et laissant pressentir le drame. Le film est porté par une Stéphane Audran parfaite, donnant beaucoup de force à son personnage de directrice d’école pleine de vie et avenante. A ses côtés, ou plutôt face à elle, Jean Yanne n’a que rarement été aussi convaincant que dans ce film. Le Boucher est sans aucun doute à classer parmi les films les plus réussis de Claude Chabrol.
Note :
Acteurs: Stéphane Audran, Jean Yanne
Voir la fiche du film et la filmographie de Claude Chabrol sur le site imdb.com.
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Un générique caverneux précède un repas de mariage ou le boucher local excelle dans l’art de la découpe d’un rosbif de premier choix. L’homme est complexe, évoluant entre rejet du père et traumatisme de guerre, il cherche la paix de son âme dans ces quelques moments passés avec Mademoiselle Hélène institutrice tolérante et passive devant l’originalité d’un gigot offert à la manière d’un bouquet de fleurs.
« Est-ce que vous aimez la viande ?» cette question surprenante insérée soudainement dans un conversationnel sans aucun rapport avec le sujet en cours démontre la dépendance de Popaul pour une thématique de boucherie toujours en embuscade dans le quotidien. Cette dérive n’hésitant pas à extérioriser ses visions morbides en pleine boutique devant la clientèle.
Il n’y a qu’un seul traumatisme, le sang dans tous ces états, celui d’Indochine et d’Algérie rapatrié dans le métier, entretenu par le crime. Un sang humain et animal d’une odeur identique. Le contact d’une institutrice cicatrisant à grand peine un chagrin d’amour apaise momentanément un cauchemar répétitif. Popaul s’offre quelques instants de futur constructif en élaborant l’ébauche d’une conquête possible.
La porte des sentiments n’est pas fermée pour cet homme positionné dans une zone de non retour, la contemplation d’actes moraux génère l’exécution de comportements naturels généreux.
Claude Chabrol embellit un parcours cinématographique plus ou moins symétrique au fil des opus d’un contexte campagnard éxistentiel isolé des lumières de la ville. Le tracteur passe, l’horloge de l’église sonne, les ruraux font leurs courses, une fusion réconfortante s’effectue entre des comédiens ressourcés et des villageois enchantés de l’aubaine de montrer qu’ils existent en sachant jouer la comédie tout en conservant leurs identités de base.
L’œuvre mérite également une attention par l’éclosion d’une sensibilité offerte spontanément au pire des criminels. Le cœur parle et exécute sans contraintes le vœu d’un mourant.
Un chef d’oeuvre…
Pour les amateurs : avec Jean Yanne également et de la même époque, Que la Bête Meure…