Lui :
Les Vampires est le nom d’une bande de malfaiteurs imaginée par Louis Feuillade pour cette série de 10 épisodes. Le jeune journaliste Philippe Guérande va mener l’enquête et les pourchasser avec son acolyte Mazamette. Il n’est donc pas question de vampire suceur de sang, le thème serait plutôt proche de Fantômas tourné par Louis Feuillade un an plus tôt. En fait, cette série était la réponse de Gaumont à Pathé qui venait de sortir Les mystères de New-York, le premier film à épisodes de l’histoire du cinéma (avec une sortie simultanée des épisodes sur grand écran et dans la presse). Le succès fut immense.
Si Les Vampires est devenu mythique, c’est en grande partie du fait de son personnage féminin Irma Vep qui, bien qu’elle fasse partie de la bande des malfrats, est en fait le personnage central et l’héroine de la série. Le journaliste n’est en effet pas toujours présent et globalement un peu fade alors qu’Irma Vep accomplit des prouesses pour réaliser ses forfaits pour le compte de ses machiavéliques patrons. Ses (rares) apparitions en collant noir ont fortement marqué les esprits, valant à l’actrice Musidora une notoriété instantanée. Aragon l’a surnommée « la dixième muse »… Irma Vep en collant noir passant furtivement par les toits pour venir se glisser dans les appartements, voilà une image qui a été maintes fois copiée au cinéma et dans la littérature populaire.
Louis Feuillade a tourné ces épisodes en pleine guerre de 14-18 avec peu de moyens. Certains acteurs étant appelés au front, le scénario devait donc tuer leur personnage assez rapidement, à commencer par le chef des Vampires qui, de ce fait, change plusieurs fois! Jugeant la police trop absente de ces aventures, le préfet de Police fit interdire la série pendant 2 mois… Résultat : dans le dernier épisode, la police a un rôle actif dans l’épilogue de la série.
Malgré son âge, Les Vampires se regarde encore avec grand plaisir et intérêt. Les différentes histoires sont assez variées, on est toujours curieux de connaître la suite. C’est assez fabuleux de voir la richesse et la force du cinéma populaire de cette époque, un cinéma qui était alors à ses tous débuts. L’imaginaire y est très fort, presque poétique.
Note :
Acteurs: Musidora, Édouard Mathé, Marcel Lévesque, Jean Aymé, Fernand Herrmann
Voir la fiche du film et la filmographie de Louis Feuillade sur le site imdb.com.
Voir les autres films de Louis Feuillade chroniqués sur ce blog…
Note: Les Vampires a été l’un des tous premiers films sauvés par Henri Langlois quand il a fondé la Cinémathèque Française. Il faudra toutefois attendre 1986 pour qu’une copie complète soit restaurée par le petit fils de Louis Feuillade avec notamment le rétablissement des intertitres dont l’absence rendait l’histoire assez obscure (ce qui a certainement dû accroître le mythe…)
Les 10 épisodes :
1. La tête coupée (40’)
2. La bague qui tue (20’)
3. Le cryptogramme rouge (48’)
4. Le spectre (38’)
5. L’évasion du mort (47’)
6. Les yeux qui fascinent (70’)
7. Satanas (63’)
8. Le maître de la foudre (52’)
9. L’homme des poisons (59’)
10. Les noces sanglantes (67’)
Fasciné par la série, Olivier Assayas a réalisé un film autour du mythe créé par Musidora : Irma Vep (1996) avec Maggie Cheung et jean-Pierre Léaud. Le film raconte un hypothétique remake des Vampires. Lire nos commentaires…
On peut se demander si le mot « vamp » (qui est une abbréviation de « vampire ») n’a pas été créé à ce moment pour Musidora.
Non, en fait, c’est Théda Bara qui fut la première vamp « officielle », le service commercial de la Fox ayant créé pour elle ce mot de toutes pièces en 1913. Musidora a certainement contribué à répandre l’usage du mot.