26 mai 2016

Interstellar (2014) de Christopher Nolan

InterstellarDans un futur proche, la Terre connaît une grave crise alimentaire. Cooper, un ancien pilote de la NASA, devenu agriculteur par nécessité, découvre grâce à l’intervention d’une intelligence extérieure inconnue l’existence d’un centre de recherches secret. Leur but est d’envoyer des humains chercher une planète à coloniser pour assurer la survie de l’espèce humaine… Interstellar est un film de science-fiction où la physique tient une place d’importance. C’est une belle extrapolation de différentes théories et spéculations scientifiques sur la nature de l’espace, du temps et de la gravité. Kip Thorne a été consultant sur le projet. Kip Thorne est un physicien théoricien américain connu pour être non seulement un grand vulgarisateur de la relativité générale mais aussi pour ses recherches. Il est par exemple un grand défenseur de la possibilité d’existence des fameux « trous de vers » (wormholes) imaginés par Einstein et bien connus des amateurs de science-fiction. Sans parler du mysticisme sous-jacent, le film n’est pas sans incohérences qui peuvent même paraître des absurdités. La volonté de pimenter le récit en est certainement la cause ; l’insertion du personnage interprété par Matt Damon relève sans doute de la même démarche (on est là proche du grand guignol…) Mais il y a tout de même suffisamment de bases pour que le film soit à classer dans les films de science-fiction les plus proches de la science, noble famille où 2001 trône en maître. Les représentations (d’un trou de ver, d’un trou noir, d’un espace à plus de trois dimensions) et les réflexions/extrapolations sur la gravitation et le temps qu’il nous propose sont plus qu’intéressantes.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Matthew McConaughey, Anne Hathaway, Michael Caine, Jessica Chastain, Matt Damon, Ellen Burstyn
Voir la fiche du film et la filmographie de Christopher Nolan sur le site IMDB.

Voir les autres films de Christopher Nolan chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Interstellar

Interstellar
Anne Hathaway et Matthew McConaughey dans Interstellar de Christopher Nolan.

Interstellar
Il peut sembler assez absurde d’envisager aller vivre sur une planète si proche d’un trou noir (à moins d’être grand amateur de barbecue) …

Interstellar
… mais le plus intéressant ici est la représentation du trou noir : Kip Thorne aurait fourni aux animateurs une série d’équations complexes qui ont été introduites dans le logiciel de modélisation. Selon la production, le résultat aurait sidéré le chercheur. Cette représentation d’un trou noir (plus exactement de la déformation de l’espace qui l’entoure) pourrait en effet être la plus réaliste qui soit. Le physicien Jean-Pierre Luminet a toutefois fait remarquer que cette représentation ne tient pas compte de l’effet Doppler : la partie la plus proche de nous s’éloigne rapidement alors que la partie la plus éloignée se rapproche de nous ce qui devrait donner d’importantes différences de luminosité et de couleur.

Interstellar
Pas facile de représenter un cube à quatre dimensions (on appelle cela un tesseract)… Plutôt que d’utiliser uniquement des images de synthèse, Christopher Nolan a opté pour la construction d’un gigantesque décor, ce qui donne une indéniable « consistance » à l’ensemble. Le résultat est très intéressant, et bien entendu très déroutant. (Photo de tournage)

8 réflexions sur « Interstellar (2014) de Christopher Nolan »

  1. Je suis assez étonné que vous ayez autant aimé ce film, qui est pour moi l’un des plus grands navets que j’aie pu voir ces dernières années.

    La dimension « scientifique » est en réalité extrêmement réduite : un poncif sur la différence d’écoulement du temps selon le déplacement (en l’occurrence selon la proximité du trou noir), un gros poncif sur les « trous de ver » (sans aucune explication, innovation, invention ou crédibilité, juste la reprise sommaire du principe, pour le principe, et puis c’est tout) et puis… rien d’autre.

    Les incohérences sont quand même très nombreuses, et la qualification de « grand guignol » ne s’applique pas qu’à l’épisode avec Matt Damon (pour lequel je vous rejoins : à se demander à quoi sert ce passage téléphoné et prévisible) mais surtout à la manière dont le héros est censé parvenir par la seule force de sa pensée à faire bouger des livres ou à coder les mouvements d’une montre. Juste comme ça, par magie, d’un coup, parce qu’il le veut ! C’est sidérant et délirant. La manière dont ils « devinent » qu’en fonçant dans le trou noir le héros reviendra dans le système solaire (??? c’est quand même du pur délire : le fait lui-même… et le fait qu’ils le « sachent » intuitivement alors que c’est ridicule scientifiquement) est également un sommet de grotesque (« Oh, pour rentrer, tu n’as qu’à foncer dans le trou noir » — gros soupir). Quelqu’un me faisait également remarquer que les vagues gigantesques sur la planète aqueuse sur laquelle ils ont pied (donc avec un fond peu profond) sont également totalement aberrantes, une insulte aux lois physiques (pour avoir des vagues aussi énormes, il faut avoir une profondeur considérable, c’est absolument et résolument impossible à un endroit où existe une aussi faible épaisseur d’eau ; et cette scène omet également le phénomène de siphon de l’eau en amont d’une grosse vague, bref c’est n’importe quoi).

    Le décor que vous signalez à la fin est en effet assez intéressant, et c’est l’un des seuls points amusants : je lui trouve une grande ressemblance avec les souterrains de Planète interdite. Ce qui veut dire que je ne le trouve pas si original que ça, mais qu’il pourrait s’agir d’un hommage.

    Alors OK, le passage avec le décalage temporel est réellement réussi (grâce à l’erreur d’interprétation qu’ils font — et découvrent trop tard — quand aux signaux envoyés par la sonde, et le choc psychologique au retour dans le vaisseau). C’est un poncif, traité mille fois dans la SF, mais il est bien traité ici, c’est vrai et on peut le saluer. OK aussi pour la représentation visuelle du trou noir. Tout ça peut donner une distraction légère.

    Mais à côté de ça, des passages grand guignol, du surnaturel (car vraiment, les scènes finales hors du temps sont grotesques et risibles), des incohérences (notamment l’oubli du décalage temporel à la fin, où il est impossible que le héros et l’héroïne aient toujours le même âge), des personnages sans épaisseur… Un gros bof.

    Et c’est dommage, car l’idée aurait pu donner vraiment quelque chose d’intéressant. Disons que c’est une série Z : si l’on accepte que c’est fait pour distraire sans chercher à être sérieux, c’est plutôt bien ficelé, et il n’y a pas de mal à se distraire avec ce genre de film. Mais le gros problème est que ce film est « vendu » comme étant rigoureux sur le plan scientifique, ce qui est mensonger et risible. Deux poncifs pas vraiment originaux (décalage temporel et utilisation d’un trou de ver) : voilà la seule dimension scientifique sérieuse ; le reste n’est absolument pas rigoureux et confine à plusieurs reprise au mystique et à la magie pure. Il y a tromperie sur la marchandise.

  2. Esprit d’escalier : j’oubliais de noter, dans les petits aspects intéressants, les robots.

    Vous ne les évoquez pas et c’est dommage, car je trouve ces robots à la fois originaux dans la forme, astucieux dans ce choix de forme, justement (qui leur donne une mobilité efficace et surprenante), et attachants sur le plan de la « personnalité ». Belle idée formelle et belle place dans le scénario, ces robots sont l’un des (rares ;-)…) aspects à sauver.

  3. Oui, oui, je suis d’accord avec vous sur l’agaçant mysticisme et les quelques incohérences.

    C’est amusant, je me suis fait la même remarque que votre ami en voyant la vague géante (ah ah, il y a 10 cm d’eau et on a une vague de 50m !) mais après réflexion : face à une énorme force gravitationnelle (le trou noir), une énorme boursoufflure d’eau devrait se créer (mais elle restera fixe face à la force, son déplacement apparent ne sera que celui de la rotation de la planète). Cette montagne d’eau ne pourrait-elle pas créer des vagues gigantesques qui descendent de ses flancs ? Pourraient-elles à un endroit donné mesurer encore une cinquantaine de mètres comme celle que l’on voit… ? Bon, comme vous le dites, le phénomène de siphon semble rendre cela impossible (la vague devrait déferler très rapidement)… sauf s’ils ont atterri au seul endroit où il y avait peu d’eau (mmh… tout cela est un peu tiré par les cheveux !)

    De toute façon, pour cette planète, ce qui me semble aberrant, c’est que l’on envisage une seule seconde aller coloniser une planète si proche d’un trou noir. Sans parler de son destin forcément funeste, les habitants devraient logiquement cuire sur place, du fait du rayonnement X par exemple : le bombardement doit être permanent. Les planètes visitées sont d’ailleurs décevantes, arides, dont toute vie semble absente. Vu le temps pour implanter la vie, ne serait-il pas plus logique de choisir une planète où au moins un semblant de vie est déjà apparu ? Je sais qu’ils ont leur propre bombe biologique dans le coffre mais quand-même…

    Pour le trou noir : le héros ne revient pas vraiment dans le système solaire en passant « au travers » : il est projeté dans un univers à plus de trois dimensions. 😉 Ce n’est qu’après coup qu’une « force supérieure » ne le remet près de Saturne (Jupiter était déjà pris par le monolithe de 2001… 😉 ) Bon, d’accord, tout le passage où il fait bouger les aiguilles est ridicule et même assez pénible. C’est dommage, d’ailleurs, parce le décor est superbe.

    Bon, mais plus généralement, il me paraît délicat de demander à une histoire mettant en oeuvre la gravité et le temps dans des situations extrêmes d’être entièrement cohérente : les trous de vers ne sont par exemple qu’une simple possibilité théorique et quant aux trous noirs, nous ne faisons qu’entrevoir certains de leurs effets. Donc on risque de ne pas raconter grand chose… La science-fiction extrapole, explore des possibilités. Interstellar me semble s’inscrire pleinement dans cette démarche. Il met en relief certains aspects de la relativité du temps, de l’importance de la gravité, etc. Il porte aussi un peu de magie en lui. Même s’il n’est pas parfait, cela fait plaisir de voir à nouveau de beaux films de science-fiction tel que celui-ci. C’est tout de même autre chose que du Michael Bay… 🙂

    Personnellement, ce que j’ai moins apprécié dans le film, ce sont plutôt les techniques scénaristiques artificielles pour pimenter le tout : le personnage de Matt Damon, les relations père-fille (sauf la scène finale de retrouvailles que je trouve assez belle), le mysticisme bouche-trou… J’ai été amusé par les sempiternels « je passe en manuel » (quand on entend cette phrase magique, on sait qu’il n’y a plus de danger, ils sont sauvés 🙂 ) Les robots ? Oui, leur apparence austère est très originale tout en contraste avec leur comportement anthropomorphe mais j’étais moins convaincu par leur côté « Transformers » (toujours sur la fameuse planète couverte d’eau).

    Si l’on entend « rigoureux sur le plan scientifique » dans le sens « vérifiable », alors c’est effectivement une erreur de dire qu’Interstellar l’est. Moi je dirais plutôt comme je l’ai mis dans ma présentation « une extrapolation de différentes théories et spéculations scientifiques ».
    Série Z ? Non franchement, vous ne pouvez pas dire cela… car cela laisse supposer que la réalisation est bâclée, ce qui n’est pas le cas.

  4. J’aime beaucoup votre : « Jupiter était déjà pris par un monolithe de 2001… » ;-).

    [Et il est vrai qu’il existe des similitudes un peu faciles avec 2001 L’odyssée de l’espace, notamment visuellement lors du passage par le trou noir / par le dispositif extratemporel ; NB : même si c’est un dispositif artificiel qui le cueille lorsqu’il frôle le trou noir, il n’en demeure pas moins délirant et surnaturel de supposer que ces astronautes aient « deviné » l’existence de ce dispositif alors qu’il leur est totalement impossible de le connaître : « Oh, pour rentrer, passe donc par le trou noir », non mais franchement !, c’est presque du Monty Python]

    Vous avez raison d’insister sur le fait que la réalisation n’est pas bâclée (c’est le scénario qui l’est, dans ses dimensions psychologiques et les relations humaines, outre ce que vous appelez ses « techniques artificielles »). Elle est en effet plutôt soignée, même si parfois un peu trop lisse.

    Je crois que je comprends ce que vous voulez dire sur la dimension d’extrapolation scientifique, mais… je ne la trouve pas vraiment dans ce film. Un film comme 2001 avait l’intelligence de s’appuyer d’une part sur des possibilités scientifiques très solides (les stations spatiales, le vaisseau, l’ordinateur, l’absence de bruit dans l’espace) et sur une absence totale de prétention à « expliquer » le reste. Kubrick et ses scénaristes ne cherchaient pas à asséner des explications, à « rendre crédible » ce qui dépassait notre science. Ils laissaient une part d’onirisme, et faisaient preuve ainsi d’une humilité et d’une simplicité extrêmement efficace.

    Ici, la volonté prétentieuse de « justifier » scientifiquement des trucs qui sont absolument absurdes ou incohérents est lourde, lourde, lourde (et malhonnête).

    Je reconnais que ce qui m’a conduit à cette réaction un peu excessive, c’est le matraquage médiatique sur la prétendue rigueur scientifique du film. C’est de la pure escroquerie, c’est une imposture. Interstellar n’a que très peu de sérieux scientifique. « Extrapoler » n’est pas une excuse : dès lors que du n’importe-quoi est présenté comme étant solide scientifiquement, dès lors qu’il prend prétexte de deux-trois bases scientifiques sommaires pour faire passer auprès du spectateur des trucs sans aucun fondement, il « trompe », il va induire plein de gens en erreur, qui viendront asséner des absurdités en s’appuyant sur l’aura « scientifique sérieuse » de ce film.

    Si Interstellar avait été présenté comme un film de science-fiction classique, c’est-à-dire bourré de spéculations arbitraires, d’inventions improbables et de situations tirées par les cheveux, j’aurais peut-être pris plaisir à le voir. Car, comme tel, je peux comprendre qu’il vous ait plu, c’est ce qu’on attend de la science-fiction, et c’est ce que j’aime lire ou voir. Mais un film « scientifiquement rigoureux », non, non, non ! La pub qui en a été faite, et la complaisance manipulatoire de sa page wikipédia sont des escroqueries.

  5. D’accord avec vous pour dire que c’est un abus de langage de dire qu’Interstellar est « scientifiquement rigoureux ». En revanche, on peut dire qu’il repose sur des bases scientifiques ce qui mérite d’être salué car ce n’est pas le cas général de la science-fiction récente au cinéma qui privilégie l’action.

    En revanche, je ne suis pas d’accord pour dire qu’il n’y a pas d’extrapolations scientifique : le trou de ver en est un bel exemple… (quoiqu’il serait plus juste sans doute de qualifier le trou de ver de possibilité théorique que d’extrapolation…)

    C’est amusant, je ne me souviens pas de la phrase qui vous a tant choqué « Oh, pour rentrer, passe donc par le trou noir » ou alors, si je l’ai entendue, je l’ai prise pour de l’humour. Ce ne serait pas un clin d’oeil au film de Disney (The Black Hole) ? Je ne me souviens plus très bien de la fin mais il semble qu’il se jette dans le trou noir.

    Bon enfin, globalement, je comprends très bien votre point de vue même si j’ai un peu l’impression que vous vous êtes un peu braqué du fait de la communication autour du film.

    De mon côté, j’ai envie de défendre le film car, hormis le fait que j’ai eu plaisir à le regarder, je veux saluer le retour de films comme celui-ci car il me semble s’inscrire dans une lignée que l’on pouvait croire perdue à jamais…

  6. « Entamé » ce jour en début d’après-midi. J’ai abandonné au bout de 37 minutes, 42 secondes. Ce film, c’est un comble, ne décolle pas et manque terriblement de rythme et l’affaire de la NASA au milieu du désert est totalement abracadabrante, au même titre que cette affaire de pilote de fusées devenu agriculteur, qui retrouve son ancien employeur ! Les situations et personnages me semblent néanmoins avoir déjà été vus 100 fois, cet qui constitue pour moi un paradoxe de mauvais augure pour la suite. Je crois que le film dure près de 3 heures, je ne serais jamais parvenu au bout. C’est ce que je reproche beaucoup au cinéma actuel : le manque d’esprit de synthèse ! N’est pas Terrence Malick qui veut, non plus !

  7. Repris hier soir : décollage immédiat et sans transition de la moissonneuse-batteuse à la fusée : quel sens de l’ellipse (remarque tout de même ironique : et la préparation?). Aventure prenantes dans l’espace, même si totalement farfelues (une planète où tu as pied mais où il y a des vagues hautes comme trois immeubles…..!!!). Très beau « trou noir », bonne utilisation du principe de la relativité du temps (vieillissement du personnage « black » resté dans la fusée… pourquoi il se défile, celui-là ?…. et des protagonistes restés sur terre). Rencontre avec Matt Damon, révélation de la supercherie du professeur… nouvel arrêt, rendez-vous plus tard ! Un bon film d’aventures spatiales, pour le moment ! Trop long, mais hâte de regarder la suite…

  8. Le félon Mann est mort. Poursuite des aventures spatio-temporelles qui s’embourbent un peu, il faut bien le dire, dans les marais du « portnawak » pour un final réellement émouvant jouant toujours sur les effets de la relativité. « On revient, mais plus rien n’est jamais vraiment pareil ».
    Au final ? Je ne sais pas trop quoi en penser. Trop long, trop alambiqué, trop tiré par les cheveux, mais de réelles qualités. Tout cela méritait-il d’y accorder près de trois heures de son temps ? Je n’en suis pas convaincu.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *