8 mars 2014

Rosemary’s Baby (1968) de Roman Polanski

Rosemary's BabyRosemary et Guy louent un appartement au dernier étage d’un immeuble qui a été le théâtre d’évènements tragiques. Ils font rapidement connaissance de leurs voisins, un couple âgé, qui se révèlent être si serviables et prévenants que Rosemary les trouve plutôt envahissants…
Rosemary’s Baby est au départ un roman d’Ira Levin dont le producteur William Castle (1), spécialisé dans les films d’horreur, avait acquis les droits. C’est la Paramount qui lui demande de le faire réaliser par le jeune Roman Polanski. Il s’agit d’une adaptation extrêmement fidèle au roman, l’une des plus fidèles qui soient. Polanski sait parfaitement jouer avec ce qu’il ne montre pas et évite tous les effets habituels des films d’horreur. C’est cela qui lui donne toute sa force, qui crée un léger malaise qui s’amplifie pour se transformer en angoisse. Il sait aussi semer puis entretenir le doute : sommes-nous effectivement face à un complot satanique ou d’une simple paranoïa ? Mia Farrow fait une superbe prestation. Le perfectionniste Roman Polanski a fait un travail remarquable, utilisant des focales courtes pour nous faire adopter le point de vue de Rosemary et montrant une certaine dextérité dans de longs plans-séquences. Après l’échec commercial de Cul-de-sac et du Bal des Vampires (qui sont pourtant deux merveilleux films), Polanski va enfin connaitre le succès avec Rosemary’s Baby qui reste aujourd’hui l’un des films majeurs du genre.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Mia Farrow, John Cassavetes, Ruth Gordon, Sidney Blackmer
Voir la fiche du film et la filmographie de Roman Polanski sur le site IMDB.
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Remarques :
* Lorsque Rosemary téléphone à l’acteur devenu aveugle, c’est la voix de Tony Curtis qui lui répond. Mia Farrow l’ignorait. Le fait qu’elle cherche à identifier cette voix qu’elle connait ajoute à son trouble apparent. Roman Polanski dit l’avoir fait dans ce but.
* C’est Mia Farrow qui chante la petite contine pendant le générique.
* Le bébé nait en juin 1966, soit 6/66.
* William Castle raconte dans son autobiographie qu’il a reçu un flot de lettres de menace de mort après la sortie du film.

(1) William Castle fait une brève apparition dans le film dans la scène de la cabine téléphonique.

rosemary's baby
John Cassavetes et Mia Farrow dans Rosemary’s baby de Roman Polanski.

2 réflexions sur « Rosemary’s Baby (1968) de Roman Polanski »

  1. Do Do L’enfant Do
    D’abord il y a l’affiche (que l’ami Rémi a postée) étrange, en deux parties, comme irréelle, noire en son cadre inférieur, un amoncellement de blocs, une montagne à gravir, sur quoi la forme d’un landau trouve un équilibre incertain, et en sa partie supérieure, au-dessus du landau, dans le ciel tissé de brumes légèrement verdâtres, une estompe de visage féminin de profil, un médaillon. La bande annonce originale américaine jouait beaucoup sur ce graphisme mystérieux. Et puis le générique aux lettres rose bonbon se déployant sur les toits de NYC en passant par Central Park jusqu’à l’historique façade architecturale à la fois magnifique et inquiétante du Dakota building, célèbre immeuble de la grosse Pomme où résident bon nombre de personnalités, tandis que la voix de Rosemary (Mia Farrow) nous susurre (La la la la…) la berceuse, leitmotiv entêtant du film, composée par Kryzstof Komeda. C’était à l’automne 68 près du Luxembourg au Studio des Ursulines blindé que s’effectuait cette découverte qui suivait celle au printemps du BAL DES VAMPIRES la même année au cinéma du Dragon à Saint Germain des prés. Le premier film américain de Polanski précédé d’une sulfureuse réputation et grand succès critique et commercial. c’était après le REPULSION londonien le second huis clos polanskien se passant dans un appartement « maléfique » (on peut considérer que son premier film LE COUTEAU DANS L’EAU se déroulant entièrement sur un yacht sur un lac entrait déjà dans cette même veine formaliste, et pourquoi pas aussi CUL DE SAC se déroulant intégralement dans un château sur une presqu’île). Ici Mia Farrow, extraordinaire, remplace Catherine Deneuve, pas mal non plus! Si les extérieurs ont bien été tournés à NYC, les intérieurs (qui représentent la quasi totalité du film) ont été tournés en studio à L.A. (Hollywood) et il faut reconnaitre à nouveau en Polanski un certain génie du décor, du cadre et de la lumière de studio.On retrouvera cela dans la suite de son oeuvre d’appartement (s) (LE LOCATAIRE, CARNAGE…)
    Je ne reviens pas trop sur le récit que tout le monde connait et qui suit la grossesse, de sa conception (viol par son mari par intrus interposé – ici nombreuses ramifications possibles d’interprétation) jusqu’à son accouchement – inconscient – ici nombreuses etc. – de l’héroïne Rosemary engendrée par le Malin pour la venue au monde du fils de Satan. Plus un supplément, un final déconcertant plus ou moins bien reçu – c’est selon suivant les spectateurs – comme souvent chez le cinéaste. Cette grossesse pas comme les autres qu’on suit d’un lent crescendo en trompe l’oeil nous offre un champ inouï d’interprétations qu’on peut tresser avec la psychologie, la psychanalyse, la vie américaine moderne, la religion et ses dérivés, l’universalité de la crainte de l’enfantement. Outre la maestria de Polanski à nous distiller à bonne distance et par petites doses notre propre paranoïa, mais surtout ne nous laissant aucun repère stable, le film repose tout entier sur les frêles épaules de Mia Farrow qui au milieu du film se fait couper les cheveux ras et devient comme un oiseau androgyne apeuré. Elle a 23 ans, sa vie privée est en délicate balance, Sinatra vient demander le divorce en plein plateau de tournage sous le prétexte qu’il l’a somme d’abandonner le tournage pour qu’elle vienne sur un des siens. L’actrice, probablement rendue vulnérable par cette double tension de sa vie privée et artistique, fait une composition magistrale de jeune femme amoureuse et candide, victime manipulée, enceinte fragile et désemparée, jeune mère la main sur le berceau, do do l’enfant do.
    La la la la la la….
    Polanski dont la vie est un roman sera atteint dans son couple quelques mois plus tard; son épouse Sharon Tate, enceinte de huit mois, sera sauvagement tuée dans leur maison de Los Angeles par la secte illuminée satanique conduite par Charles Manson (mort en prison la semaine dernière).
    Vous avez dit fiction?

  2. C’est vrai que l’affiche originale est superbe. Je l’ai remise en plus grand pour la peine… et ajouté aussi une image du début du film.
    Vous avez raison de rappeler la concomitance du tournage avec le divorce de Mia Farrow car cela a dû influencer son jeu. Mia Farrow a d’ailleurs toujours un jeu très naturel.

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