30 juillet 2012

Le grand alibi (1950) de Alfred Hitchcock

Titre original : « Stage fright »

Le grand alibiUne jeune élève-actrice tente de prouver l’innocence de son ami qui est accusé d’avoir assassiné le mari d’une chanteuse de music hall… Même s’il a été beaucoup critiqué (1) et s’il n’est pas à classer parmi les meilleurs films d’Hitchcock, Le grand alibi n’est pas sans attrait. Il y a cette atmosphère délicieusement anglaise apportée par les seconds rôles, le jeu constant avec le mensonge et une belle interprétation de Jane Wyman, empreinte de candeur et de délicatesse (2)(3). Après un projet ambitieux mais de tournage difficile, Les amants du Capricorne, Le grand alibi Hitchcock a décidé de mettre en scène cette histoire qui manque un peu d’ampleur et dont l’une des erreurs est, selon sa propre analyse a posteriori, qu’à aucun moment les personnages ne sont en danger. Le grand alibi se regarde toutefois sans déplaisir et comporte de belles scènes comme celle du taxi, la fête de patronage ou encore toute la scène finale dans le théâtre.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jane Wyman, Marlene Dietrich, Michael Wilding, Richard Todd, Alastair Sim
Voir la fiche du film et la filmographie de Alfred Hitchcock sur le site IMDB.
Voir les autres films de Alfred Hitchcock chroniqués sur ce blog…

Remarque :
* On remarquera la présence de Patricia Hitchcock, la fille du réalisateur, qui interprète l’une des élèves comédiennes amies de Jane Wyman. C’est sa première apparition à l’écran, avant donc son rôle bien plus connu (la binoclarde Barbara) dans L’inconnu du Nord Express. Elle a également tourné dans Psychose.

(1) – NE LISEZ PAS ce qui suit si vous avez l’intention de voir le film –
Alfred Hitchcock a été beaucoup critiqué pour le flash-back en début de film dans lequel il a enfreint une règle d’or du cinéma : « l’image ne peut mentir ». Hitchcock a admis par la suite qu’il n’aurait pas du le tourner.

(2) Hitchcock raconte avoir eu toutefois du mal à diriger Jane Wyman pour les scènes où elle était censée s’enlaidir pour se faire passer pour l’habilleuse de Marlene Dietrich. L’actrice ne supportait pas de paraître sous un jour défavorable à côté de Marlene et a tout fait pour améliorer peu à peu son apparence.

(3) On a beaucoup critiqué le choix d’Alastair Sim, acteur anglais alors très populaire, pour le rôle du père qui apporte une note comique, il est vrai, plutôt inutile.

Homonyme :
Le grand alibi de Pascal Bonitzer (2008) avec Miou-Miou et Lambert Wilson.

14 réflexions sur « Le grand alibi (1950) de Alfred Hitchcock »

  1. Le scénario de ce film a été écrit par Whitfrield Cook, d’après deux nouvelles de Selwyn Jepson : « Man running » et « Outrun the Constable ». Il n’est donc pas question d’un roman d’Agatha Christie. La confusion pourrait provenir du livre que François Truffaut a consacré au maître autoproclamé du suspense où il décrit ce film comme « un petit policier anglais dans la tradition d’Agatha Christie. » Le film a été exploité en Belgique sous le titre « Le Trac ».

  2. Merci bien pour cette rectification.
    C’est corrigé.
    En fait, c’est plus une erreur de ma part. Je l’ai vu juste avant de publier sur la fiche IMDB… sauf que, visiblement, je regardais alors la fiche du film français homonyme !

  3. Il y a une erreur dans votre notice, Patricia Hitchcock ne joue pas la femme de chambre de Marlène Dietrich mais une des élèves comédiennes, camarades de Jane Wyman, celle qui « cafte » au détective Smith sur l’absence de leur camarade aux répétitions ces derniers jours.

  4. Oui, il me semble bien que vous avez raison. Je corrige.
    Merci de me l’avoir signalé.
    Décidément, j’ai cumulé les erreurs sur ce petit billet… 😉

  5. Qu’on me permette un tout petit rectificatif à propos d’une erreur très fréquente et qui se retrouve dans tous les commentaires sur ce film jusques y compris dans des ouvrages dits de références ! Le film a été tourné bien avant la sortie des Amants du capricorne et ne peut donc de ce fait avoir été entrepris pour faire face à l’échec financier (retentissant il est vrai) de l’opus précédent. Mais il a écrit juste après le succès de scandale de La corde (et son relatif échec commercial). C’est un point mineur, peut-être, mais qui a néanmoins son importance, le film n’est donc pas du tout une commande consécutive à un échec d’un film personnel.

  6. En revanche, ce qui est vrai, c’est que l’échec du Grand alibi à sa sortie en avril 1950 a dissuadé le cinéaste de filmer tout de suite, comme il était prévu, La loi du silence, et de se tourner vers un sujet dont il savait qu’il ferait un succès et qui était L’inconnu du nord express. Les commandes ne sont pas où l’on croit.

  7. Ce qui vous dites m’étonne beaucoup : il aurait donc tourné Stage Fright entre La Corde et Les Amants du Capricorne ? Ces deux films sont des Transatlantic. C’est un peu bizarre qu’il ait tourné un film pour la Warner entre les 2, surtout que La Corde a été (selon Hitchcock lui-même) une réussite financière.

    J’ai repris le livre d’entretiens Hitchcock/Truffaut pour voir ce que Hitchcock disait. Il ne dément pas Truffaut quand celui-ci lui dit « Après La Corde, vous avez tourné Under Capricorn… », pas plus que quand il lui dit « Après Under Capricorn, vous avez tourné Stage Fright ». (C’est vrai toutefois qu’il n’y pas d’autres précisions chronologiques de sa part).

    Vous êtes bien certain ?

  8. Transatlantic Pictures était une compagnie fondée secrètement en Grande-Bretagne par Alfred Hitchcock avec son ami Sidney Bernstein dès 1945 en vue de la fin, en avril 1947, du contrat qui liait Hitchcock à David O. Selznick.
    « Stage Fright » a été commencé dans un studio londonien, mais de graves difficultés financières, créées par l’insuccès de « Under Capricorn », ont conduit la Transatlantic au bord de la faillite. Alfred Hitchcock a été contraint de renoncer à son indépendance et la Warner a repris à son compte la production du film qui a été achevé dans ses studios.
    Les trois films sont sortis aux dates suivantes aux Etats-Unis : « Rope » le 25 septembre 1948, « Under Capricorn » le 8 octobre 1949 et « Stage Fright » le 15 avril 1950.

  9. Merci pour ces précisions. Je comprends mieux l’enchaînement. Mais alors, Stage Fright aurait-il été tourné (au moins partiellement) avant Under Capricorn ?

  10. Voici ce que j’ai pu récolter dans ma documentation.
    Le film est basé sur la nouvelle de Selwyn Jepson « Man Running » paru dans le numéro du 30 août 1947 de la revue Collier’s Weekly et publiée en volume à Londres chez l’éditeur MacDonald en 1948.
    Le storyboard a été dessiné par Alfred Hitchcock en 1949. Il a été vendu chez Bonhams à Londres le 7 juin 2011. Le catalogue de cette vente précise que les prises de vue ont débuté cette même année 1949 dans les studios d’Elstree à Londres.
    Sachant que le storyboard est daté 1949, et vu qu’Hitchcock passait plusieurs mois pour réaliser un film, il ne lui aurait pas été possible de tourner « Stage Fright » – « bien avant » [selon Boris] – « Under Capricorn » lequel est sorti le 8 septembre à New-York et un mois plus tard sur les écrans aux USA.
    Restons en à la version officielle : Alfred Hitchcock aurait entamé le tournage de « Stage Fright » dès la fin de celui de « Under Capricorn » et l’aurait terminé dans les studios hollywoodiens de la Warner en 1950, d’où sa datation.
    On n’en saura pas davantage. Encore un mystère à mettre au crédit de Sir Alfred !

  11. Ah, voilà qui est intéressant !

    J’ai fait mes petites recherches de mon côté aussi :
    Dans l’autobiographie d’Ingrid Bergman « Ma Vie », il y a mention d’une lettre de l’actrice à une de ses amies, elle est datée du 6 août 1948 et commence ainsi : « C’est ma septième semaine d’attente! Le film a démarré comme convenu le 19, mais avec Hitch et ses séquences de dix minutes (…)  » (Chapitre 12, page 227 de l’édition Fayard de 1980).
    Le 19 en question est donc le 19 juin 1948 (7 semaines avant le 6 août) pour le début du tournage de Under Capricorn, c’est donc avant la sortie de The Rope… On voit mal comment Hitchcock aurait pu caser le tournage d’un autre film encore avant.

    Dans le gros livre de Maria Riva sur sa mère, Marlene Dietrich, on peut lire (page 651 de l’édition Flammarion de 1993) : « Le tournage de Stage Fright démarra le 1er juillet 1949. » et un peu plus bas sur la même page « Stage Fright étant terminé, elle fit une réservation pour le bateau, appela son astrologue et trancha en faveur de l’avion. Elle arriva le 5 novembre, (…) »
    Un autre source (le livre américain de Jean-Jacques Naudet sur les archives de Marlene Dietrich) cite comme dates de production de Stage Fright (incluant une partie de la préparation donc): 31 mai – 19 septembre 1949. De son côté, Patrick Brion indique « 13 juin à septembre 1949 ».

    Boris a donc raison : la gestation (et une bonne partie du tournage) de Stage Fright ont bien été fait *avant* la sortie de Under Capricorn (première le 8 septembre 1949, sortie générale américaine le 8 octobre). Ce n’est donc pas son insuccès qui l’a poussé à tourner Stage Fright. Je vais modifier mon texte pour enlever « Ebranlé par l’échec de son film précédent ».

  12. Bravo ! Voilà qui explique cette énigme. Il est dommage que Boris n’ait pas indiqué ses sources, ce qui nous aurait facilité la tâche…

  13. Bonjour!

    On ne va pas spoiler (hum)…
    Mais si le scénario n’est pas adapté d’Agatha Christie, le principe narratif n’est-il pas entièrement redevable au Meurtre de Roger Ackroyd (1926)? Et n’est-ce pas tout l’intérêt du film ou du moins, le premier souvenir qu’il évoque?
    Ils n’en parlent pas dans le Hitch/Truffaut (ne l’ai pas sous la main)?

  14. Non, ils n’en parlent pas.
    Hitchcock dit seulement : « Le livre était paru peu de temps avant et plusieurs critiques littéraires avaient mentionné dans leur compte-rendu : « Ce roman ferait un bon film pour Hitchcock. » Et moi, comme un idiot, je les ai pris au mot! »

    Note : Le roman en question est « Man Running » de Selwyn Jepson. Il n’est pas impossible que l’écrivain se soit inspiré du Meurtre de Roger Ackroyd (qui, soit-dit en passant, n’a bizarrement jamais été porté à l’écran)…

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