4 juillet 2010

La vérité sur Bébé Donge (1952) de Henri Decoin

La vérité sur Bébé DongeLui :
Adaptant pour la troisième fois un roman de Simenon, Henri Decoin adopte un style très noir et pessimiste dans cette histoire d’amour manqué entre un riche industriel, homme à femmes, et une jeune fille pleine d’espérance et de naïveté. La Vérité sur Bébé Donge offre à Danielle Darrieux l’un de ses plus beaux rôles, complexe et multi-facettes, fragile et vulnérable face à un Gabin plein de certitude et d’assurance. Henri Decoin assoit sur son film sur une solide construction, tout en flashback avec de fréquents allers-retours avec le présent qui rendent le film plus sombre. La Vérité sur Bébé Donge nous offre également une certaine peinture sociale et une vision sur les rapports homme femme de cette époque.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Danielle Darrieux, Jean Gabin, Jacques Castelot, Daniel Lecourtois, Claude Génia, Gabrielle Dorziat
Voir la fiche du film et la filmographie de Henri Decoin sur le site IMDB.

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Une réflexion sur « La vérité sur Bébé Donge (1952) de Henri Decoin »

  1. L’ANGE EXTERMINATEUR

    Bébé Donge repart comme elle est venue. Avec sa petite valise et un regard absent, qui va au delà du spectateur. Au début, à la descente du train de Paris. A la fin, vers la prison. En vérité pour l’oubli. « C’est une folle » dit l’un, « C’est un monstre » répond l’autre. Pourtant, Bébé ne désire que de l’Amour. Celui que l’on vit et construit à Deux. Jusqu’à en devenir impitoyable, meurtrière, monstrueuse. Lui, François Donge ne veut que le Pouvoir. Son frère, ses femmes, ses concurrents, son médecin, et jusqu’au juge et au colonel en retraite qu’il humilie, toute la petite ville qui pue les tanneries est à sa botte. Il a tout prévu, commandé, dirigé. Sauf l’Amour que Bébé lui porte.
    Arrive l’ange exterminateur. Simenon revu par Bunuel et Pasolini. François Donge doit donc mourir, mais pas sans avoir, auparavant avoué ses fautes et ses regrets. On n’a jamais aussi bien décrit la petitesse de la bourgeoisie provinciale, que dans cette superbe scène de la réception/présentation/ séduction entre Bébé et François. Même les mouvements de caméras en démontrent toute l’immoralité. Le montage découpe les reins et les cœurs au scalpel. Le dialogue est aussi poisseux qu’élégant. Les personnages, tous, autant cyniques que décadents et qu’inutiles.
    «La vérité sur Bébé Donge» en fait «La vérité DE Bébé Donge», car elle ne supporte pas le mensonge. Mieux, ou pire, elle n’y croit pas.
    Pour la première fois depuis très longtemps (années 30) Gabin «partage la vedette» et le premier rôle. Danielle Darrieux, l’égérie de Decoin tient le devant du film. Après « Martin Roumagnac », « Miroir » et la « Marie du Port », Gabin prolonge et «enrichit» son personnage de fils-du-peuple-parvenu au-sommet-à-force-de-pugnacité. Ici, le passé prolétaire est à peine suggéré, tandis que son faiblard de frère fait plutôt «fin de race». Là aussi, il joue à double facette: Le potentat, ou le mari amoureux. Les flash backs de Decoin vont et viennent de l’un à l’autre et de Bébé l’exaltée à Bébé l’impavide exterminatrice.
    Pour la première fois, également, Gabin apparaît en pyjama. Le début d’un long défilé, à rayures ou uni.
    L’unique opus du quatuor majeur Simenon/Decoin/Darrieux/Gabin. Une date du cinéma noir français. Un chef d’oeuvre de la comédie de mœurs.

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