15 mai 2010

La bataille du rail (1946) de René Clément

La bataille du railLui :
Premier film de René Clément, La Bataille du Rail était à l’origine un court métrage commandé par le CNR (Conseil National de la Résistance) au lendemain de la Libération. Les premières épreuves furent jugées si intéressantes qu’il fut décidé d’en faire un long métrage. La Bataille du Rail se présente en premier non comme une fiction mais comme un document, montrant les actions de la Résistance et de nombreux cheminots anonymes au moment du débarquement des forces alliées. L’art de René Clément est d’impliquer le spectateur et de nous faire adhérer totalement sans jamais utiliser le sentimentalisme ou le spectaculaire gratuit. En tant que premier grand film sur la Résistance, La Bataille du Rail définit de facto un certain nombre de codes que suivront bon nombre de films sur le sujet. L’image d’une résistance pratiquée par tous les français répondait un besoin légitime de glorification immédiate, au lendemain de la Libération. Le film fut tourné en grande partie avec des acteurs non professionnels, en utilisant des balles réelles (les plus faciles à se procurer). Ses scènes les plus fortes restent marquées durablement dans les esprits : l’exécution des otages, l’attaque du train blindé et le déraillement de l’Apfelkern, reconstitué avec un train réel et filmé par trois caméras. Le film garde ainsi toute sa force soixante-cinq ans plus tard.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Jacques Desagneaux, Tony Laurent, Robert Le Ray
Voir la fiche du film et la filmographie de René Clément sur le site imdb.com.

Voir les autres films de René Clément chroniqués sur ce blog…

Remarques :
Le film fut primé à Cannes en 1946 mais ne fut que très peu distribué à l’étranger, ce qui explique sa faible notoriété hors de France.

7 réflexions sur « La bataille du rail (1946) de René Clément »

  1. Il faut aussi souligner le mode particulier de financement du film puisqu’il a été supporté par les syndicats de cheminots. C’était un film donc très peu coûteux, mais il a bénéficié de l’aide des cheminots eux-mêmes pour la figuration et pour le matériel.
    René Clément a obtenu pour ce film l’équivalent de la palme d’or.
    Quant au consensus pro-résistant du film, ce n’est pas seulement une nécessité politique de le présenter. C’est aussi une réalité observable,il faut dire qu’à partir de 1944, tout le monde voulait voir les allemands repartir chez eux. Les français avaient vraiment souffert du pillage allemand, et donc naturellement les collabos étaient devenus de moins en moins nombreux.

  2. Le film a été interdit de distribution en France et dans de nombreux pays car il donnait un certain nombre de méthode utilisées par les résistants pour paralyser les transports…

    Ho chi minh le faisait projeter, le FLN Algérien l’utilisa, etc…

    C’est néanmoins un film remarquable sur bien des points…

  3. Un beau film, une sorte de documentaire romancé. Mais rien à voir avec la réalité. Pendant l’Occupation, les cheminots ont fait leur travail, point barre. Comme tant d’autres, globalement, ils ont été des résistants de la vingt cinqième heure. Un mythe de plus, comme celui des 30.000 fusillés communistes.

  4. Mais qu’est-ce qui nous raconte, le Zof, là !??
    … »résistants de la 25 e heure » ?… alors que c’est un métier, avec les imprimeurs qui compte le plus de fusillés et torturés !!!
    Faut oser quand même !

  5. Oui, oui, oui…
    Le film a été interdit. Sans doute car financé par des syndicats haïssables.
    Souvenir de vieux schnock (n’est-ce pas ?) mon premier contact avec cet univers ferroviaire fut tracé par mon oncle Jean de Bar le Duc qui était chauffeur de route à la SNCF. A l’époque.
    Oncle Jean s’inquiétait beaucoup de mes lectures portant sur le NSDAP, les engagés volontaires dans la SS, l’aventure du Reich qui devait durer mille ans. A un point tel qu’au bout de quatre ans certains se sont dit « mille ans, déjà ? »
    J’en avais à peine treize… Oncle Jean me fit parvenir l’un de ces volumes bleus, aux éditions France-Empire, collection « J’ai lu » et qui racontait ce que fut la bataille du rail. Il y avait participé. Il en fut l’un des agents, l’un des anonymes, l’un des moteurs invisibles mais déterminants de cette lutte qui devait s’astreindre à obtenir la libération de notre pays. Et des autres. Le droit de parler encore en français.
    Bien des années plus tard je devais faire « mon dernier train. » C’est une chose terrible pour un cheminot encore jeune de faire « son dernier train. »
    Celui là était un train militaire. En partance pour Toulon puis l’Afghanistan… De jeunes soldats nous avaient aidé au chargement des véhicules de combat. Il y a des choses qui ne trompent pas entre un départ en exercice et un départ en OPEX. Il suffit de voir.
    Lorsque tout fut consommé, mon dernier train paré au départ, j’ai indiqué à l’officier d’accompagnement le lieu vers lequel nous allions tirer la rame, atteler la locomotive et lui fis les recommandations indispensables pour la sécurité de ses personnels.
    Le monde ferroviaire est un monde particulier, étrange, auquel beaucoup de nos compatriotes n’apportent que peu d’attention. Une sorte de monde inconnu.
    Je dis alors à ce jeune lieutenant qu’il se trouverait à proximité du P 2. Non loin du « mur des fusillés. »
    – « Le mur de quoi ? »
    – « Vous ne savez pas ? Ici, à Porte-lès-Valence, l’un derniers trains de déportés, dénommé « train fantôme » est reparti dans des conditions rocambolesques en 1944. Le lieutenant SS qui coiffait ce convoi a demandé qu’on avitaille une locomotive afin de continuer sa route vers Dachau. Mes camarades cheminots de l’époque ont refusé. »
    – « Ensuite ? »
    – « Ensuite ils les ont collé au mur et les ont assassiné. »
    – « Silence… »
    – « Lorsqu’on a détruit il y a quelques années le dépôt de Portes, on a gardé un pan de mur en l’état. Il est juste à côté du P2. On y a vissé des plaques de marbre portant tous les noms de ces hommes, exemples de courage. Voyez, mon lieutenant, être cheminot ça veut dire ça. Aussi. »
    J’approchais de la soixantaine mais n’avais jamais vu un officier claquer des talons devant un pékin.
    On est comme ça nous, les cheminots.
    Merci Tonton !
    JA S.

  6. Il faut rappeler que, souvent, les sabotages entraînaient des représailles touchant des populations innocentes. Mais cela, les résistants s’en fichaient. Beaucoup préparaient l’avenir , non seulement le « parti des 70000 fusillés » (un mythe, effectivement), mais aussi les gaullistes (« toutes les places pour nous, et tout de suite », dirent-ils en 1958). Et si l’on fouille un peu dans l’histoire (écrite ou non) de la résistance, on découvre des choses peu reluisantes: authentiques patriotes du maquis accusés de collaboration, exécutés sommairement puis réhabilités le lendemain, mais se taisant pour l’éternité car ils en savaient trop; Hardy accusé d’avoir vendu Moulin, alors que c’est la femme « Aubrac » (pseudonyme) qui l’a dénoncé en échange de la libération de son mari; relations trouvbles entre certains réseaux et la rue Lauriston…

    Quant aux Allemands, eux aussi étaient embringués dans cette guerre déclarée par la France, et ils se défendaient comme ils pouvaient. Aujourd’hui, nous risquons de payer le fait de n’avoir pas su faire la paix ni en 1918, ni en 1945… Car il n’y a toujours aucun armistice, aucun traité de paix avec l’Allemagne depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Les gâchis du XXe siècle, ça suffit…

    Bon, à part ça, je suis un peu étonné de voir, dans ce film, des Pershing avec la conduite à gauche (normal en France) et d’autres avec la conduite à droite. Machines AL, ou transformées par les Allemands pour un service outre-Rhin?

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