28 juin 2008

Le Guépard (1963) de Luchino Visconti

Titre original : Il Gattopardo

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Elle :
(En bref) Grosse déception pour cette nouvelle projection de ce film si vanté de Visconti par rapport au souvenir que j’en avais gardé. Palme d’Or 1963 et souvent présenté comme chef d’oeuvre du 7e Art, Le Guépard me semble avoir bien vieilli. Burt Lancaster est toutefois particulièrement émouvant.
Note : 2 étoiles

Lui :
(En bref) Avec cette nouvelle vision, Le Guépard m’est apparu d’un esthétisme trop formel, trop descriptif de l’univers de Visconti, presque laborieux.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Burt Lancaster, Claudia Cardinale, Alain Delon
Voir la fiche du film et la filmographie de Luchino Visconti sur le site imdb.com.

Voir les autres films de Luchino Visconti chroniqués sur ce blog…

9 réflexions sur « Le Guépard (1963) de Luchino Visconti »

  1. Je trouve bien sévère, tous les deux. Moi, j’aime les grandes fresques de ce genre, avec ce qu’elles ont d’empesé et de grandiloquent.

    Burt Lancaster est tout à fait bon et j’ai été ravi de voir « Terence Hill » dans un rôle bien différent de celui qui joue dans le film qui m’a permsi de le découvrir, « Mon nom est personne ». J’en avais oublié que cet acteur était italien.

    Ma dernière grande fresque en date: « Le docteur Jivago ».

  2. Immense chef-d’oeuvre avec l’une des plus belles musiques de l’histoire du cinéma.

    Ce qu’il importe de relever au-delà du chef-d’oeuvre esthétique que représente Le Guépard, avec cette perfection formelle qui peut paraître étouffante à certains, c’est la profondeur et l’intelligence du film, qui livre une réflexion très fine sur l’Histoire, les révolutions, et la manière dont elles finissent toutes. A cet égard, l’esthétique du film est aussi une manière habile de nous dire que chaque révolution ou bouleversement historique donne lieu à un déferlement d’apparats et de solennités derrière lesquels se cachent les vrais raisons, et les vrais gagnants, de la révolution. Car pour certains, rien ne change. Ou comme le dit si bien Salina, il faut que tout change pour que rien ne change.

    Le Guépard est aussi l’histoire d’un homme, qui comprend que son temps est fini et qu’il va mourir. Et il choisit de partir dignement sans essayer de rester dans ce temps nouveau qui n’est plus le sien, ce qu’il a compris.

  3. Bourgeoisie bouillonnante et aristocratie conservatrice s’affrontent dans une fresque chatoyante dans les palais, sanguinaire sur le pré. Le prince Salina fatigué par la piété d’une femme se signant avant chaque étreinte toise un avenir naissant plus convivial représenté par un rire féminin extrait naturellement libérant une dentition privée d’éventails protecteurs.

    L’aristocrate menacé doit s’intégrer dans un temps fabricant de nouveaux bourgeois avides de propriétés terriennes. Les dernières fresques d’un monde sur le déclin se meurent en contemplant la disparition de l’habit de salon au profit d’un costume citoyen.

    Le Maire est l’égal du Prêtre. La terre se rachète, se partage. L’ecclésiastique n’est plus sécurisé par le support de ses pauvres. La continuité apaisante des êtres dans un monde au repos se doit à l’union alchimique d’idées naguère en luttes.

    Angelica et Tancrède unis afin de faire cesser les combats sont les uniques garants d’une cohabitation durable entre le rituel et la transaction.

    « Le guépard » est une fresque somptueuse, une peinture sociale convulsée remarquablement mise en images par un cinéaste offrant une âme à des théories combatives éternelles entre nantis et défavorisés. Un esthétisme coloré en intérieurs, aride en plaines faisant tournoyer les corps par les valses ou les balles.

    Luchino Visconti cadre merveilleusement la différence entre la magnificence d’un salon et l’austérité d’un repas champêtre dans un contexte ou un principe existentiel quitte irrémédiablement un prince sur le retour servant de corridor entre la fusion nécessaire d’une noblesse assiégée par les besoins d’une classe moyenne en plein essor.

    Une mésalliance devient l’alliance d’une continuité établie sur les ruines d’un monde englouti. Nobles et Bourgeois sont sur une fréquence identique en continuant de faire respirer la terre. Un mariage de raison indispensable à la naissance d’un esprit communautaire.

    Par l’intermédiaire d’une étoile, un vieux prince regarde s’éteindre un pouvoir éphémère confié à de nouvelles énergies elles-mêmes menacées par des idées nouvelles encore en sommeil

  4. Ah tiens, votre opinion sur ce film est assez surprenante…
    Pour moi, cet esthétisme dont vous parlez est l’un des grands atouts du film.

  5. Bonjour,

    Je viens de chroniquer ce film sur mon blog (http://www.newstrum.wordpress.com). En butinant sur le net, je suis tombé à nouveau sur votre réaction au film. Je m’aperçois que je l’avais déjà commentée en 2008, mais je la trouve toujours aussi incompréhensible. Le Guépard est un des chefs-d’oeuvre du cinéma, un film aussi beau qu’émouvant. C’est aussi un film passionnant parce qu’il raconte, car c’est à la fois le portrait d’un époque et d’un monde qui disparait et le portrait d’un type d’homme mélancolique, sensible au passage du temps.

    Votre commentaire sur l’esthétisme soit-disant « laborieuse » du Guépard me rend particulièrement perplexe. S’il y a bien un plan sur lequel Le Guépard devrait rallier les suffrages, c’est sur le plan visuel. Le film est une splendeur de tous les instants.

    Strum

  6. Il faudrait sans doute que je revoie ce film pour voir si nous n’étions pas mal lunés ce jour-là… Car Visconti est un réalisateur que j’aime beaucoup, notamment pour l’esthétisme formel (et assez noble) de ses films. C’est vrai que c’est bizarre que parmi tous les films de Visconti présents sur ce blog, ce soit Le Guépard qui ait pratiquement la plus mauvaise note. 😉

    Ah, je viens de lire votre commentaire enthousiaste sur votre blog. Cela tranche avec mon commentaire expéditif.
    Votre blog me paraît en outre très intéressant, vous avez une belle sélection de films !
    https://newstrum.wordpress.com/

  7. En effet, car Le Guépard est pour moi d’assez loin le plus beau film de Visconti et celui où son style visuel est à son apogée ! 🙂

  8. Merci pour votre commentaire sur mon blog. Il est assez récent, et il est moins fourni que le vôtre en termes de nombre de films chroniqués. La plupart du temps, je n’écris que sur les films que j’aime.

  9. TRANSITION
    « Il faut que tout change afin que rien ne change »
    Qu’est ce qui doit changer pour que l’essentiel demeure ?
    C’est là toute la question de cette fresque, chef d’oeuvre viscontien. Un de plus. Cette phrase est lancée par le bouillant neveu Tancrède (Delon jeune félin bondissant) rendant visite à son oncle le prince Salina en son palais sicilien (Lancaster félin vieillissant). L’oncle et le neveu, deux faces d’un même miroir, celui d’une aristocratie en mue dans une époque troublée par le tumulte révolutionnaire. Cette phrase met les deux hommes devant un choix à faire. Entre les deux, comme trait d’union, la pulpeuse Angelica (la Cardinale) jetée en pâture au jeune loup de neveu prêt à toutes les compromissions. « Nous fûmes les guépards, les lions; ceux qui nous remplaceront seront les chacals et les hyènes et tous, nous continuerons à nous considérer comme le sel de la terre » constate avec amertume et mélancolie, désabusé devant l’accélération de l’Histoire, l’oncle sentant venir sa mort prochaine face à la longue contemplation solitaire de « La mort du juste » de Greuze lors de la célèbre grande séquence finale du film (45 minutes de bal).
    L’unique roman de Giuseppe di Lampedusa, publié post mortem en 1958, traduit en français en 59, inspire aussitôt Visconti qui travaille sur une adaptation, le tournage démarre en 62 et le film est présenté à Cannes en 63 où il décroche la palme. Le film sort à Paris au seul cinéma « Avenue » tout l’été et tout l’automne avec des taux de remplissage incroyable. Les deux hommes, le romancier et le cinéaste, sont aristocrates de grande culture, esthètes et sceptiques, désespérés par une histoire italienne brûlante dont ils furent témoins; il était logique qu’une rencontre artistique se produise même si Visconti n’utilise que des passages précis du roman. On comprend qu’il est proche du héros de l’écrivain et qu’il aurait pu l’interpréter lui-même avant de demander Laurence Olivier pour l’incarner et puis finalement Burt Lancaster qui en fait une création mémorable.
    L’oeuvre, le roman comme le film, est une méditation sur le temps suspendu qui décompose tout, à commencer par le décor, le palais princier orné du blason familial sur lequel danse un guépard, tout un monde qui se meurt alors que monte l’ascension du vrai pouvoir, celui de l’argent et des mutations en devenir.
    Le Guépard révèle une critique du futur basculement dans le fascisme des élites traditionnelles d’alors
    Une version restaurée et complète de 3h15 est parfois présentée en 70mm, elle vaut le coup pour la palette raffinée rendant ses teintes à la splendide photo de Giuseppe Rotunno qu’illumine magistralement la partition de Nino Rota de ses thèmes profonds
    Le guépard représente la synthèse parfaite entre une oeuvre littéraire et son adaptation cinématographique, comme le sera à nouveau plus tard Mort à Venise

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