13 août 2007

Le Samouraï (1967) de Jean-Pierre Melville

Le SamouraïElle :
Dans le genre des grands films policiers à la française, Melville excelle avec une mise en scène originale et un scénario palpitant. Le personnage glacial qu’incarne Delon et le sarcastique commissaire de police créent un climat angoissant et mystérieux. Les jeux d’ombre et de lumière, les couleurs grisâtres, les longues absences de dialogues où seuls les bruits ambiants dominent, font de ce jeu du chat et de la souris un film atypique.
Note : 5 étoiles

Lui :
Classique du film noir français, Le Samouraï est aussi une ode de Jean-Pierre Melville à Alain Delon qui, ceci dit, deviendra ensuite presque prisonnier du genre. Raide, le regard froid, sans expression, le personnage joué par Delon traverse avec superbe les lieux sans qu’ils n’aient de prise sur lui. Jeu minimaliste de Delon : il ne semble qu’être… Atmosphère bien noire et filatures superbes complètent ce petit bijou qui n’a pas pris une ride.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Alain Delon, François Périer, Nathalie Delon
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean-Pierre Melville sur le site imdb.com.

Voir les autres films de Jean-Pierre Melville chroniqués sur ce blog…

Remarque :
Le film Tueur à gages (This gun for hire) de Frank Tuttle (1942) a inspiré Jean-Pierre Melville : le personnage interprété par Alain Delon est assez proche tu tueur solitaire personnifié par Alan Ladd.

6 réflexions sur « Le Samouraï (1967) de Jean-Pierre Melville »

  1. C’est effectivement un super film noir où tout s’exprime par une image particulièrement sobre, le son et la parole étant en ponctuation. Du très grand cinema.

  2. Un chef d’oeuvre parmi les chefs d’oeuvre de Melville, du même niveau que le Cercle Rouge. On parvient même à oublier que Delon fera ensuite du « Delon » : il sert ici parfaitement son personnage. Remarquable.

  3. Ce film est en effet fascinant, on y retrouve les regards sur soi-mêmes que portent tous les héros de films de gangsters de Melville, les grosses voitures américaines, l’art de porter des feutres avec élégance, la minutie dans les détails, les dialogues peu verbeux…

  4. La parenté entre « Le samourai » et « Tueur à gages » va beaucoup plus loin que la ressemblancer entre Delon et Ladd. En effet dans les deux films le tueur est amoureux d’une chanteuse de cabaret qui n’est peut-être pas une chanteuse de cabaret. Dans les deux films le tueur n’a pour seul ami qu’un animal, et en outre on remarque dans les deux films l’importance des gares et des trains.

  5. Un des meilleurs Melville,une triste fin pour le personnage incarne par delon,avec qui on commençait par sympathiser

  6. LE FAUVE BLESSE SOLITAIRE
    Jean Pierre Melville n’est jamais meilleur que dans l’épure dont il signe ici tel un calligraphe oriental la forme maitresse aboutie. C’est un peu le Bresson du polar. Et Le samourai est son fleuron
    Le récit linéaire est mené sans une once de graisse jusqu’à son ultime plan avec ce qu’il faut de constance et d’abnégation : absence de dialogue inutile, d’égarements annexes, de scène d’amour qui distrait le spectateur…Tout est précisément millimétré pour nous tenir en haleine sans jamais décrocher
    Le traitement de l’image (Henri Decae) aux bronzes gris bleutés presque métalliques évoquant l’effacement de la couleur, et celui de la musique (François de Roubaix) aux notes de musique répétitives comme des gouttes de pluie sont en osmose avec le rythme contribuant à l’atmosphère du film
    Dès le superbe plan d’ouverture (générique) la note est filée dans la pénombre à contre jour de la chambre de notre samourai où seuls le reflet de la pluie glisse sur le plafond, une fumée de cigarette, le chant d’un canari et des bruits réguliers et monotones de la rue montent lentement, lancinants. Notre loup planqué solitaire, anonyme et silencieux vit avec un locataire de chambrée, un oiseau qui lui viendra en aide en temps voulu
    Il porte un nom pour lui donner un peu d’identité humaine : Jeff Costello; profession tueur à gages. Notre homme fonctionne et sa fonction est de tuer. Il ne peut donc qu’être condamné à la solitude. Il est le tigre de la citation placée en exergue tirée du Bushido, ce code ancien des samourais (la voie du guerrier) « Il n’est pire solitude que celle du samouraî, sauf peut-être celle du tigre dans la jungle ». La jungle étant ici celle de la ville (Asphalt jungle) et de sa pègre de malfrats véreux. Une séquence magistrale de filature dans le métro (où les poinçonneurs existaient encore) accompagne l’adage
    Si Melville a été chercher un vieux film noir américain des années 40 pour repère – il en a redessiné la structure et les contours – c’est pour mieux s’en détacher par la forme et une autre portée. Beaucoup de grands auteurs de cinéma et de théâtre ont souvent procédé ainsi
    Dans les polars de Melville il y a toujours des policiers dignes d’intérêt, depuis Jean Dessailly dans Le doulos, Paul Meurisse dans Le deuxième souffle, ou Bourvil à venir dans Le cercle rouge (tous excellents). Ici c’est François Périer qui s’y colle avec déterminisme. Il a en face de lui un autre être déterminé, implacable, impénétrable, froid, méticuleux, sur de lui. Où est la faille? Peut être que le tueur tombe amoureux, fasciné à son tour, mais chut….
    Le samourai doit toute sa réussite à une rencontre
    Rencontre de fascination complexe – quasi d’ordre amoureux – entre le cinéaste et l’interprète. Comme avant lui René Clément avec Plein soleil et Luchino Visconti avec Rocco et ses frères, Alain Delon, absolument magnétique, impassible, habité en sa mission, endosse sa panoplie dès le départ face au miroir : regard impénétrable, imper clair à col relevé, feutre à bord ajusté; un portrait au miroir dépouillé de toute fioriture
    C’est vrai qu’on peut trouver une sorte de similitude d’image entre Alan Ladd et Alain Delon (déjà le nom) mais l’acteur français s’élève bien au dessus de son confrère américain
    L’animal blessé et traqué, seul, ne peut évidemment qu’être piégé à l’arrivée, alors pourquoi ne pas se jeter soi même dans l’inéluctable. Ca n’est pas un conte de fées, et son regard bleu acier à l’ultime instant vacille
    Le film, tourné dans les propres studios du cinéaste à Paris 13ème ont brûlé pendant le tournage à l’été 67 et les décors ont été reconstruits

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