8 juillet 2007

Lola (1961) de Jacques Demy

Lola Elle :
Jacques Demy nous entraîne au coeur des années soixante dans un univers étrange fait de dérives, d’envies irrépressibles de fuir une vie ennuyeuse et aussi une folle envie de connaître le vrai amour. C’est bien fait. Les destins se croisent et s’entremêlent. Seule l’interprétation d’Anouk Aimée en danseuse de cabaret est un peu exagérée et agaçante.
Note : 4 étoiles

Lui :
Jacques Demy nous propose dans son premier film une sorte d’étude, de variations sur le thème de l’absence et de l’attente en amour. Tous ces personnages, séparés momentanément ou définitivement de leurs partenaires, se croisent et s’entrecroisent, le tout dans un univers pittoresque (le Nantes des marins) comme détaché de la réalité, ce qui donne au film une allure de conte. Hélas, le jeu d’Anouk Aimé semble un peu trop forcé dans le genre écervelée, à tel point que l’on se demande par moments si elle n’a pas été doublée.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Anouk Aimée, Marc Michel, Jacques Harden, Alan Scott
Voir la fiche du film et la filmographie de Jacques Demy sur le site imdb.com.

Voir les autres films de Jacques Demy chroniqués sur ce blog…

4 réflexions sur « Lola (1961) de Jacques Demy »

  1. « A tel point que l’on se demande parfois si elle n’a pas été doublée. »
    Je ne partage pas votre avis, ne m’étendrai pas dessus et apporterai seulement une précision… Le film a joui d’un budget extrêmement restreint, sans prise de son. La bande son a donc été enregistrée ensuite, il s’agit donc bel et bien d’un doublage…

  2. La post-synchronisation était monnaie courant à l’époque. Revoyez « Jules et Jim » où elle est tellement « criante », c’est à dire décalée, qu’elle finit par apporter une touche esthétique devenue inhérente au film.

  3. En réalité : la chanson de « Lola » est doublée, mais celle de Jeanne Moreau dans Jules et Jim – Le Tourbillon – ne l’est pas : c’est le seul instant du film tourné en son-direct ce qui est très novateur pour l’époque dans un film 35mm. Notons néanmoins qu’entre les deux, il y a eu Une Femme est une femme de Godard, film couleur 35mm tourné entièrement en son-direct… Godard, novateur et précurseur, comme souvent.

  4. TROIS JOURS DE PERM A NANTES

    En juin 1960 un jeune futur cinéaste de 29 ans à la provincialité déjà revendiquée, fils d’un garagiste nantais, commence le tournage en Scope de son premier long métrage tout en extérieurs et en muet puisqu’entièrement ensuite post synchronisé. Ce Jacquot de Nantes entre avec bonheur et originalité dans la cour des grands avec ce premier film dont il est auteur du scénario, du dialogue et de la réalisation, sur des images composées de camaieux de gris par le chef op Raoul Coutard
    LOLA, après un faux proverbe chinois en exergue (« Rit qui veut, pleure qui peut ») commence sur une ouverture à l’iris et sur quelques mesures du PLAISIR d’Ophuls à qui le film est dédié. Une Cadillac blanche entre dans le champ et à son bord le premier des sept personnages principaux très différents qui ne vont pas arrêter de se croiser, décroiser, recroiser dans des gracieuses arabesques de travellings, les accompagnant par une caméra en apesanteur, et ou chaque figure reprend et répète la précédente sans cesse comme sur un manège ou dans une ronde, pour reprendre l’allusion à Ophuls. Même les scènes parlées ressemblent déjà à des scènes chantées ou dansées, c’est à dire rêvées. Lorsque Lola chante sa fameuse chanson, Anouk Aimée dit le texte comme une poésie sur laquelle à la post synchronisation Michel Legrand composera une musique sur les paroles d’Agnès Varda
    « C’est moi, c’est moi Lola
    Celle qui rit à tout propos
    Celle qui dit l’amour c’est beau
    Celle qui plait sans plaisanter
    Reçoit sans les dédommager
    Les hommages des hommes âgés
    Et les bravos des braves gars
    C’est moi, c’est moi Lola » etc.
    Cette héroine est une soeur des Nuits blanches de Visconti / Dostoievski : elle attend le retour de l’être aimé qui l’a laissée enceinte, parti ailleurs depuis sept ans faire fortune et qui doit revenir, il lui a promis (c’est l’homme blanc à la Cadillac blanche dont le début du film signe le retour, donc déjà quand ça commence, tout est fini). Elle l’attend avec son fils qu’elle élève seule. Il y a déjà les marins qui vont et viennent, les femmes seules qui attendent avec leurs enfants, des amours enfuies qui reviennent, des manèges et une ville portuaire, des occasions perdues, des chassés croisés, déjà tout Demy est là en entier
    Dans le passage Pommeraye Roland Cassard recroise et reconnait Cécile / Lola, une amie d’enfance qui chante aujourd’hui dans un cabaret de la ville : L’Eldorado

    LOLA fait partie de ces films magiques que plusieurs générations de cinéphiles ont adoré d’emblée et fait fantasmer
    LOLA tisse aussi comme c’était la pratique l’époque des liens avec les collègues amis de la vague nouvelle; c’est ainsi que Roland Cassard dit à Lola « J’avais un copain, Michel Poiccard. il est mort. il s’est fait descendre. il avait mal « tourné ». Ironie liée à la sortie en salles des films : au printemps 60, alors que Demy
    s’apprête à tourner LOLA qui ne sortira qu’au printemps 61, Poiccard / Belmondo meurt à la fin d’A BOUT DE SOUFFLE
    Bien sur on retrouvera Lola et Roland dans d’autres films ultérieurs de notre auteur, cinéaste unique dans le paysage du cinéma français
    La voix, l’allure, le débit, les manières maniérées d’Anouk la bien aimée, la bien nommée, comme celles d’Elina Labourdette, autre personnage, font merveille. C’est Trintignant que souhaitait Demy face à Anouk (avant que Lelouch le réussisse) mais il lui a fallu revoir sa copie et c’est Marc Michel qui interprètera Roland Cassard à la dernière minute, lui qui répondra à Lola (en guêpière noire sous imper blanc) que « Vouloir le bonheur, c’est déjà un peu le bonheur »
    Le film se clôt par un fondu à l’iris emportant la Cadillac blanche vers un probable eldorado américain. Je me souviens qu’encore écolier, en sortant du film (que j’ai vu en entrant par la sortie de secours du Palace-Italie) j’ai dérobé aux Galeries Lafayette le 33 tours du concerto 7 de Beethoven dont le thème me trottait dans la tête. Que ne font pas faire certains films!!

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