29 avril 2006

Laissez-passer (2002) de Bertrand Tavernier

Laissez-passer Elle :
Un seul mot pour qualifier ce film : magistral ! C’est du grand art auquel se livre Bertrand Tavernier en rendant hommage au maîtres d’oeuvre du cinéma français sous l’occupation. Mise en scène brillante avec une caméra qui frôle les personnages et imprime un rythme soutenu et virevoltant. De très beaux éclairages et décors, des acteurs exceptionnels comme Jacques Gamblin qui incarne le réalisateur Jean Devaivre, militant communiste fonceur ou Denis Podalydès jouant le rôle plus passif du cinéaste Jean Aurenche. Enfin, un scénario en béton qui vous scotche devant l’écran pendant près de trois heures.
Note : 5 étoiles

Lui :
Avec Laissez-passer, Bertrand Tavernier nous dresse le portrait du cinéma français sous l’occupation allemande, utilisant pour cela l’histoire d’un assistant et celle d’un scénariste. Ces deux personnages traversent la guerre de manière très différente, mais sans être en opposition, ils se complètent en quelque sorte. Le scénario de Laissez-passer est extrêmement dense et riche, et les quelque 2h50 du film passent sans aucune lenteur, sans aucun temps mort. Bertrand Tavernier fait preuve d’une grande maîtrise de la mise en scène, et cette maîtrise se ressent à tous les niveaux : caméra, éclairage, mise en place. Un véritable sans-faute qui donne un grand film passionnant.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Jacques Gamblin, Denis Podalydès, Charlotte Kady, Marie Desgranges, Ged Marlon
Voir la fiche du film et la filmographie de Bertrand Tavernier sur le site IMDB.

Voir les autres films de Bertrand Tavernier chroniqués sur ce blog…

3 réflexions sur « Laissez-passer (2002) de Bertrand Tavernier »

  1. Je me retrouve totalement dans vos analyses, notamment concernant le rythme formidable, qui fait que les 2h50 passent sans que l’on n’y prenne garde. De ce point de vue, c’est un modèle du genre, qui devrait être étudié dans les écoles de cinéma pour montrer comment le découpage peut rendre haletant un film au récit apparemment calme : un bon montage est plus efficace qu’un rebondissement forcé.

    Par ailleurs, j’avais été frappé, à l’époque de sa sortie, par le rejet violent (vraiment violent !) qu’il avait suscité de la part des descendants des tenants de la nouvelle vague. Je me souviens de chroniqueurs qui en étaient pratiquement venus aux mains sur le plateau du Masque et la plume.

    Cette controverse, et l’outrance ridicule des détracteurs de Laisser-passer, m’avait permis de mieux comprendre le sens profond de la nouvelle vague : il s’agissait alors de faire du réalisateur un « artiste total et impulsif » qui est le seul et unique auteur d’un film, prenant le contrepied de la notion d’artisanat et de « travail bien fait ». En montrant la puissance artistique et la qualité de ce dernier, Tavernier a fragilisé et un peu « dénudé » les mythes (et les assertions catégoriques) de la nouvelle vague.

    Il est vrai que dans Laisser-passer, Tavernier fait l’éloge d’un cinéma humble et sérieux, où les réalisateurs ne se prennent pas pour des stars romantiques et géniales. Il réhabilite l’idée que la contrainte est créatrice, et que le professionnalisme de chaque intervenant (éclairagiste, scénariste, metteur-en-scène, etc.) peut se mettre au service d’une œuvre.

    Finalement, Tavernier rappelle que ce qui compte c’est le film, et pas son auteur. Que l’œuvre d’art doit primer sur l’artiste et sur son égo.

    Contrairement à ce que semblaient croire les héritiers autoproclamés de la nouvelle vague, cette réhabilitation ne nie pas les apports de la nouvelle vague en matière de créativité. Mais elle permet de replacer cette nécessaire bouffée d’air frais de la fin des années 50 et du début des années 60 à sa juste place : un bousculement créatif mais certainement pas l’aboutissement de l’art !

    Bref, outre sa qualité propre (qui est considérable), ce film a été charnière dans ma compréhension du cinéma, et même de l’art. Ce n’est pas rien !

  2. Merci pour ce commentaire.
    Je n’ai pas personnellement suivi ces discussions polémiques à la sortie de ce film. Mais votre analyse et vos conclusions me paraissent très justes.

    Il est étonnant que le concept même de Nouvelle Vague entraine toujours des prises de positions très tranchées. J’ai quelquefois eu des discussions avec des personnes pour lesquelles il fallait être *pour* ou *contre* la Nouvelle Vague. Je trouve cela assez stérile et terriblement réducteur. Comme vous le dites, la Nouvelle Vague a été un bousculement créatif, elle a apporté beaucoup au cinéma, mais on ne peut juger tout le cinéma selon un seul schéma de lecture.

    Personnellement, je suis un peu trop jeune pour avoir vécu la Nouvelle Vague en direct mais ses films font partie des tous premiers que j’ai vus quand j’ai commencé à m’intéresser au cinéma. Ils ont certainement participé à déclencher cet intérêt (passablement durable) que j’ai pour cet art mais ce fut surtout un point d’entrée car le cinéma n’a pas de forme unique (ni même de forme idéale vers laquelle il devrait tendre). Il ne faut surtout rester bloqué sur un seul schéma.

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